Les protéines désordonnées, très courantes tant chez les eucaryotes que chez certains virus, interviennent dans des mécanismes biologiques déterminants[3] et dans de nombreuses maladies infectieuses. Or les méthodes actuelles de la biologie structurale, comme la cristallographie, ne prennent pas en compte leur flexibilité. Cette capacité à changer de forme joue pourtant un rôle fondamental dans leur activité biologique.
Une équipe de recherche de l’IBS (CEA/CNRS/Université Joseph Fourier) s’est intéressée aux mécanismes d’interaction entre deux protéines du virus Sendai, virus proche de celui de la rougeole chez l’Homme. Il s’agit d’une nucléoprotéine et d’une phosphoprotéine qui ont un rôle clé dans la multiplication de ce virus : leur interaction déclenche la réplication de l’ARN viral et provoque donc l’infection de l’organisme hôte. En utilisant la résonance magnétique nucléaire (RMN), les chercheurs ont pu reconstituer avec une résolution atomique, les différentes étapes du passage de la forme libre et flexible de la nucléoprotéine (NT, en jaune ci-dessous, avec son site actif en vert) jusqu’à son ancrage sur la surface de la phosphoprotéine (PX, en orange ci-dessous) pour trouver le site d’interaction.
Le site actif de la NT libre adopte très rapidement différentes conformations. Seule l’une d’entre elles, une hélice d’une longueur particulière, peut interagir avec PX.
Cette approche méthodologique permet de reconstruire en 3D le déroulé de nombreux mécanismes biologiques, et en particulier, de mieux comprendre le mode de fonctionnement des protéines désordonnées. Elle pourra notamment être utilisée pour le développement d’agents pharmacologiques agissant directement sur ces molécules, souvent impliquées dans des maladies humaines.
[1] Institut de Biologie Structurale, à Grenoble.
[2] Virus de la famille des paramyxovirus pathogène chez le modèle murin. Les virus de la rougeole et des oreillons, pathogènes chez l'Homme, appartiennent à cette même famille.
[3] Voies de signalisation, régulation de la transcription ou de la réplication de l'ADN.