Les nanotubes de carbone représentent une classe très particulière de
nanoparticules dont les propriétés mécaniques et électroniques
exceptionnelles ont motivé des applications dans divers secteurs de la
société, depuis les matériaux de structure jusqu’à certains composants
électroniques. Les nombreuses utilisations présentes et futures des
nanotubes de carbone justifient les études menées dans le monde entier
sur leur impact sur la santé humaine et sur l’environnement.
Des chercheurs du CEA [1] et du CNRS [2], se sont associées [3]
pour étudier la distribution de ces nanoparticules au cours du temps
chez la souris suite à une contamination par voie pulmonaire. Ils ont
utilisé un marquage radioactif combiné à des outils de radioimagerie,
afin d’atteindre une sensibilité de détection la plus grande possible.
Ainsi, des atomes de carbone stables (12C) ont été remplacés,
directement pendant la fabrication des nanotubes, par des atomes de
carbone radioactifs (14C) au sein même de la structure des nanotubes de
carbone. Cette méthode permet d’utiliser des nanotubes de carbone
comparables à ceux produits industriellement, mais marqués au 14C. Par
radioimagerie, l’approche permet de détecter jusqu’à une vingtaine de
nanotubes de carbone sur une coupe de tissus de l’animal.
Après
une exposition pulmonaire de souris (20 microgrammes de nanotubes
marqués, administré en une seule fois au début du protocole) et un suivi
pendant un an, cette étude a permis de démontrer le passage des
nanotubes de carbone du poumon vers différents organes, notamment le
foie, la rate et la moelle osseuse. Elle démontre la capacité de ces
nanoparticules à franchir la barrière pulmonaire (barrière air/sang).
Par ailleurs, il a été observé une augmentation continue au cours du
temps de la quantité des nanotubes de carbone dans ces organes,
traduisant une absence d’élimination de ces particules, sur cet
intervalle de temps. Des études ultérieures devront préciser si cette
observation perdure au delà de 1 an.
Les équipes du CEA et du CNRS
ont développé un ensemble de compétences, très spécifiques, qui leur
permet d’étudier sous différents angles l’impact sanitaire et
environnemental des nanoparticules. Ces recherches en nano-toxicologie
et en nano-écotoxicologie représentent à la fois une priorité sociétale
et un enjeu scientifique, avec des approches expérimentales et des
concepts encore en émergence.
Pour le CEA, ces recherches
s’inscrivent dans les programmes transversaux Toxicologie et
Nanosciences du CEA, structures de pilotage, de coordination et
d’animation qui favorisent des approches pluridisciplinaires pour
étudier les effets potentiels sur le vivant de différents composés
d’intérêt industriels (métaux lourds, radionucléides, nouveaux
produits,…).
[1] Institut de biologie et de technologies de Saclay - Ibitecs- & Institut rayonnement matière de Saclay - Iramis
[2] Laboratoire de photonique et de nanostructures du CNRS et Laboratoire Francis Perrin (CNRS/CEA)
[3] Ce travail a été soutenu par le programme de toxicologie du CEA, l'Union européenne, l'Anses et les projets européens NANOGENOTOX et NanoMILE
Concernant le CNRS, ces préoccupations s’inscrivent
en particulier dans le cadre des actions phares comme le Groupement de
recherche international i-CEINT, action internationale pilotée par le
CNRS sur l’éco-toxicologie des nanoparticules. Les aspects normatif et
réglementaire sont également fortement suivis par les équipes du CNRS
depuis longtemps, comme dans le cas du programme piloté par le CNRS dans
l’action ANR NanoNORMA, ou actuellement, notamment dans le cadre du
réseau national C’Nano.