Développer les énergies de demain
Innover pour le nucléaire

Dans un contexte marqué par l’urgence climatique, par des tensions sur l’approvisionnement énergétique et la montée des prix, le CEA s’est engagé à renforcer ses travaux de recherche dans le domaine des énergies, en particulier l’énergie nucléaire, et ses formations au service des industriels de la filière.

Soutenu par le plan d’investissement gouvernemental France 2030, l’organisme a essaimé des start-up pour concevoir les petits réacteurs du futur, SMR et AMR, et apporte son soutien technique à l’ensemble des acteurs qui se structurent sur ces nouveaux marchés. Outre la création de l’Agence de programme nucléaire innovant (APNI), plusieurs décisions des conseils de politique nucléaire sont venues renforcer ses engagements en faveur de l’innovation et de la recherche. En parallèle de ces actions prospectives, le CEA continue d’améliorer les outils et techniques d’assainissement-démantèlement et le recyclage des combustibles usés.

Formation d’intervention en environnement EDF au chantier-école de l’INSTN Cherbourg. Initiation au pilotage du coeur d'un REP (réacteur à eau pressurisée) Formation d’intervention dans une chaufferie nucléaire de sous-marin Formation d’intervention en tenue Orano étanche non ventilée au chantier-école de l’INSTN Cherbourg Formation d’intervention en zone contrôlée jaune, au chantier-école de l’INSTN Cherbourg

Institut national des sciences et techniques nucléaires (INSTN)

La relance de la filière nucléaire s’accompagne d’un fort besoin de compétences, estimé par le Groupement des industriels français de l’énergie nucléaire (Gifen) à 10 000 recrutements par an jusqu’en 2033. L’Institut national des sciences et techniques nucléaires (INSTN) du CEA délivre des enseignements et des formations à tous les niveaux de qualification dans les domaines de l’énergie nucléaire, des systèmes énergétiques bas carbone et des technologies pour la santé sur ses cinq sites (Cadarache, Cherbourg, Grenoble, Marcoule et Saclay). Il forme des étudiants et professionnels dans les métiers de la filière nucléaire, dont six métiers en forte tension. Sur les 3 000 nouveaux diplômés qui rejoignent la filière chaque année, 600 sont diplômés par l’INSTN, soit 20%. L’objectif pour l’INSTN est de doubler ce nombre d’ici à trois ans et d’adapter son offre de formation professionnelle continue en réponse à la croissance des besoins. Ainsi, depuis l’opérateur jusqu’à l’ingénieur spécialisé, la formation permettra de pourvoir les très nombreuses opportunités d’emploi des décennies à venir. À l’initiative de France Travail et de l’Université des métiers du nucléaire, l’INSTN s’est associé en mars 2023 à la toute première édition de la Semaine nationale des métiers du nucléaire pour faire connaître les carrières et les formations, notamment auprès des personnes en reconversion.

Faits marquants 2023

Des start-up
pour un nucléaire innovant

Le CEA a essaimé 4 start-up dans le domaine du nucléaire innovant : Otrera, Hexana, Blue Capsule, et Stellaria. Les trois premières ont été retenues en 2023 dans le cadre de l’appel à projets « réacteurs nucléaires innovants » du plan France 2030 – Stellaria l’a été en 2024. Le CEA accompagne également l’ensemble des autres acteurs retenus, notamment à travers l’APNI, qu’il héberge.

Recycler son
savoir-faire nucléaire

Les autres énergies bas carbone, hors nucléaire, nécessitent de grandes quantités de métaux critiques, tels que le lithium, l’indium ou le cobalt. Une problématique à laquelle le CEA entend répondre en recyclant… son savoir-faire ! Les techniques de séparation et d’extraction mises au point pour la filière nucléaire peuvent en effet être adaptées pour les batteries, les aimants, les panneaux solaires et bien d’autres éléments encore. Les recherches menées sur le centre de Marcoule répondent ainsi à l’engagement environnemental du CEA, tout en contribuant à l’indépendance énergétique de la France.

Visite du tokamak WEST de l’IRFM en Réalité Virtuelle

Les robots s’invitent
dans les réacteurs

Qu’il s’agisse de nucléaire innovant ou de l’assainissement-démantèlement, le CEA facilite les processus et épaule les équipes grâce à des solutions numériques. Mises en pratique sur nos propres installations puis transférées à des industriels, ces compétences et ces technologies sont valorisées à l’international et contribuent à l’avenir de la filière.

L'assistance numérique et la robotique peuvent par exemple aider à réduire le temps d'occupation des travailleurs en zone contrôlée. Un démonstrateur a ainsi été développé en 2023 pour la découpe laser dans le cadre du démantèlement, avec une programmation intuitive qui s’adapte à son environnement. Cette robotique intelligente et auto-apprenante pourrait avoir des applications au-delà du nucléaire. L’IA vient également doper la vision numérique pour le tri des déchets et leur conditionnement. L’imagerie spectrale permet de les trier plus rapidement, tandis que côté conditionnement, la solution numérique sera couplée avec une meilleure « main » robotique. Un démonstrateur est en cours de création, pour s’assurer d’une bonne préhension automatique, une affaire plutôt complexe quand on ne connaît pas à l’avance la forme et le poids des déchets à saisir !

Les jumeaux numériques offrent quant à eux des simulations 3D d’installations, avec toutes leurs composantes, pour appréhender au mieux un chantier. De son côté, l’INSTN dispose de plusieurs plateformes en réalités augmentée et virtuelle qui permettent de former les futurs intervenants. La réalité virtuelle peut même simuler des tâches qui devront être menées dans des réacteurs… qui n’existent pas encore ! Les équipes du CEA ont ainsi vérifié que certaines interventions dans le futur réacteur ITER étaient réalisables. En somme, un métavers industriel avant l’heure.

Vérification des capteurs de température sur le condenseur de la boucle EVEREST © A.Aubert/CEA

Valider la sûreté
et le cœur de Nuward

Le développement de Nuward, SMR auquel participe le CEA et d’autres partenaires, a connu plusieurs avancées remarquables en 2023. La boucle Everest, développée par le CEA, a été mise en service sur le centre de Cadarache pour valider le système de refroidissement passif du futur petit réacteur modulaire, un mécanisme de sûreté essentiel en cas de situation accidentelle. Le CEA a également mené des études sur la conception du cœur de Nuward, avec la mise au point d’un schéma de calcul neutronique pour la phase d’avant-projet sommaire et des études déterministes de référence pour la phase d’avant-projet détaillé. Ses actions s’inscrivent en soutien au partenaire industriel qu’est EDF.

Les belles avancées
de la fusion nucléaire

Si le CEA est reconnu comme un acteur historique de la fission nucléaire, il mène aussi des travaux sur la fusion. En fin d’année 2023, le tokamak JT‑60SA, le plus grand en fonctionnement au monde, a été inauguré au Japon. Conçue et financée par l'Union européenne et le Japon en parallèle de l'accord international Iter, cette installation de recherche ​a impliqué le CEA dans sa conception et construction, et continuera de mobiliser les équipes pour l’exploitation scientifique.

Côté start-up du nucléaire et sur une toute autre technologie, l’année a aussi été marquée par le dépôt du projet Taranis en réponse à l’appel à projets du programme France 2030. La Direction des applications militaires (DAM) du CEA, associée à des unités mixtes de recherche, est fortement impliquée dans les échanges techniques avec Thalès sur ce projet qui a pour objectif de produire de l’énergie au moyen d’un réacteur à fusion nucléaire par confinement inertiel laser. Taranis a été retenu en 2024, et le CEA accompagnera la première phase.

Signalons également le lancement du programme de recherche SupraFusion, mené avec le CNRS. Son objectif sera de développer de nouveaux matériaux supraconducteurs à haute température critique qui serviront notamment aux tokamaks.

Prototype de Vitrification In-Can Dem&Melt

Faire mousser les terres
et vitrifier les boues

Après des essais concluants, le projet pilote Demeterres Mousse est entré en phase de fabrication en 2023. Mené en partenariat avec l’IRSN, Orano et Asteralis, une filiale de Veolia, il vise à traiter les terres argileuses contaminées par du césium, comme les sols de Fukushima par exemple, à l’aide d’une mousse de flottation. Des tests préliminaires avaient montré l’efficacité du dispositif pour séparer argile et césium, sans affecter la fertilité du sol et sur de grands volumes. Une solution qui pourrait aussi trouver sa place lors de la dépollution d’anciens sites nucléaires en cours de démantèlement.

En aval du cycle, le CEA améliore aussi les procédés. La vitrification des déchets non valorisables nécessite de très hautes températures. Avec In-Can DEM&MELT, le CEA développe des matrices d’enrobage « basse température », à 800°C contre 1 100°C. Principal avantage : la vitrification peut alors se faire in situ, au plus proche des besoins. En 2023, le procédé a été testé une première fois pour le conditionnement de boues, démontrant la capacité de l’installation à traiter différents types de déchets solides ou liquides.