La chlordécone et le lindane sont des composés chlorés utilisés comme pesticides pendant de nombreuses années dans les Antilles françaises. Ces pesticides se dégradant très lentement, ils ont entrainé une pollution à long terme des sols et des eaux et une contamination de la population locale. Dans des études précédentes, les chercheurs du Genoscope avaient identifié plusieurs bactéries1 capables de dégrader en anaérobiose2 la chlordécone en de nombreux produits. L’analyse génétique de ces bactéries a permis d’identifier une voie de biosynthèse de certaines molécules, les corrinoïdes, également connues pour intervenir dans des réactions chimiques efficaces pour dégrader la chlordécone.
Les chercheurs ont voulu vérifier si les corrinoïdes produites par l’une de ces bactéries, appelée Citrobacter sp.86, pouvaient dégrader la chlordécone. En laboratoire, ils ont donc incubé ce pesticide avec des souches de Citrobacter sp.86 produisant des corrinoïdes, et des souches qui n’en n’étaient plus capables.
Des produits issus de la dégradation de la chlordécone ont ainsi été détectés en présence uniquement des bactéries produisant des corrinoïdes. La même expérience a été menée sur un autre pesticide chloré, le lindane, dont la structure est pourtant très différente de celle de la chlordécone : à nouveau, seules les bactéries produisant des corrinoïdes ont pu dégrader ce composé. Ces résultats montrent donc que les corrinoïdes produits par Citrobacter peuvent servir à la dégradation de différents types de composés organochlorés.
Cette étude ouvre la voie à de nouvelles perspectives de bioremédiation via la bioaugmentation et/ou biostimulation dans les sols pollués de bactéries produisant des corrinoïdes, favorisant ainsi la dégradation des composés chlorés présents.
1 – Les bactéries Citrobacter sp.86 et Desulfovibrio sp.86. Ces bactéries ont été isolées après un long processus d’enrichissement à partir d’échantillons environnementaux.
2 - milieu sans oxygène.