Comprendre le développement du cerveau nécessite de remonter à la naissance des cellules qui le composent. Si le processus de formation des neurones est à présent compris, celle des cellules gliales, leurs principaux partenaires dans de nombreuses fonctions cérébrales, recèle encore son lot de mystères. C'est notamment le cas des astrocytes qui constituent la plus grande population de cellules gliales du cerveau. Initialement considérées comme de simples cellules de soutien, ces cellules ont en fait de nombreux autres rôles essentiels, notamment dans la régulation du flux sanguin cérébral et le fonctionnement des synapses. Elles intriguent par leur organisation en réseau tridimensionnel continu, et la variété de leurs propriétés morphologiques, moléculaires et fonctionnelles.
Pour mieux comprendre comment ce réseau se met en place dans le cortex cérébral, siège des fonctions nerveuses les plus élaborées, les chercheurs de MIRCen (IBFJ/CEA-DRF) en collaboration avec les chercheurs de Sorbonne Université, de l'Ecole Polytechnique, du CNRS, de l'INSERM regroupés au sein de l'Institut de la Vision et du Laboratoire d'optique et biosciences (LOB), ont fait appel à deux approches complémentaires : la technique MAGIC Markers attribuant aux cellules neurales des couleurs basées sur l'expression de protéines fluorescentes1 , et la microscopie ChroMS associant couleur, 3D et haute résolution2.
La première approche crée un « code couleur » identifiant les astrocytes issus de la division d'une même cellule souche neurale. La seconde permet de visualiser en 3D ces groupes (clones) d'astrocytes dans le cerveau de souris.
L'association de ces deux techniques a permis aux chercheurs de caractériser avec précision la composition de dizaines de clones d'astrocytes corticaux. Ils révèlent ainsi la composition variable de ces clones en termes de nombre et sous-types d'astrocytes - des astrocytes issus de la même cellule souche pouvant appartenir à des sous-types différents - et leur organisation intriquée, reflétant des remaniements au cours du développement. L'étude précise aussi les trois phases de développement du réseau d'astrocytes du cortex : colonisation du tissu nerveux, prolifération et maturation. Les résultats indiquent que les astrocytes ont un comportement plastique et dynamique pendant ces trois étapes.
Cette plasticité développementale des astrocytes ouvre de nouvelles perspectives quant à la compréhension de la formation du cerveau et au lien entre certaines pathologies neuro-développementales ou neurodégénératives et des anomalies du développement cérébral.
1 : Loulier K.et al. Multiplex
lineage tracking with combinatorial labels. Neuron 2014, 81(3):505-20.
2 : Abdeladim L., et al. Multicolor multiscale brain imaging with chromatic multiphoton serial microscopy. Nature Communications 2019, 10(1):1662.