Vous êtes ici : Accueil > Découvrir et Comprendre > Les thèmes > La radioactivité

Dossier multimédia | Livret thématique | Radioactivité

La radioactivité

Les applications de la radioactivité


​La radioactivité est un moyen extraordinaire pour explorer l'être humain et l'environnement. Elle est également indispensable pour l'industrie, l'art et l'espace.

Publié le 17 décembre 2018

Les traceurs radioactifs

Les propriétés chimiques d'un isotope radioactif et d'un isotope stable du même élément chimique sont identiques ; la seule différence est que le radioisotope est instable. Cette instabilité provoque l'émission de rayonnements qu'il suffit de détecter pour suivre sa trace et localiser la molécule marquée. 

Le marquage peut être effectué de deux manières :

  • en remplaçant un atome stable d'une molécule par un de ses isotopes radioactifs
  • en accrochant à une molécule un atome supplémentaire, radioactif.


Le radiotraceur est choisi en fonction de sa période radioactive, qui doit être suffisamment courte pour que la masse de traceur soit très faible mais corresponde à une activité détectable. Il est également choisi pour la nature et l'énergie des rayonnements émis. 


pour la santé

Les possibilités offertes par les applications des traceurs radioactifs en recherche biologique et en médecine ont été l’un des facteurs essentiels du progrès médical au cours du XXe siècle. Elles ont permis l’avènement de la biologie moléculaire avec la détermination du code génétique, la caractérisation des réactions chimiques assurant le fonctionnement de la cellule ou encore la compréhension de ses mécanismes énergétiques. Elles ont également contribué à élargir les possibilités de diagnostic pour mieux détecter et guérir les maladies : c’est la médecine nucléaire.

automate de synthèse
Automate de synthèse pour la production de radiopharmaceutiques marqués, au laboratoire Cycéron. © P. Stroppa/CEA









La scintigraphie, application de la radioactivité

La méthode de marquage permet de suivre l’action d’une molécule (médicament…) dans un milieu donné (in vitro) ou dans l’organisme (in vivo) grâce à un traceur radioactif. Celui-ci est utilisé en très petites quantités, car les appareils de détection sont très sensibles. Le plus souvent, il est produit dans un cyclotron, la synthèse est faite en enceinte blindée, avant que la molécule marquée soit injectée au patient. Le traceur induit des doses dont les effets sont peu dangereux pour la santé si on les compare aux bénéfices de l’examen (voir dossier multimédia L’homme et les rayonnements). Comme leur période est courte (de quelques minutes à quelques jours), ils disparaissent rapidement de notre corps et de l'environnement. 

Utiliser des molécules marquées avec un radionucléide émetteur gamma spécifique du métabolisme d’un organe ou d’une tumeur permet, grâce à une gamma caméra, de réaliser une image des sites où elles se sont fixées. Cette image fonctionnelle sert à vérifier le fonctionnement de l’organe ou localiser une tumeur et ses métastases éventuelles. 

VidéoLa tomographie par émission de positons (TEP)


Quelques exemples : 

  • Le sucre marqué au fluor 18, émetteur bêta plus, favorise la détection des tumeurs (qui se développent vite et dont les cellules sont très avides de sucre) par un examen appelé « PET Scan » (TEP en français, pour Tomographie par émission de positons) ; 
  • Les zones de dysfonctionnement du cœur peuvent apparaître en réalisant l’image de la répartition d’une injection de thallium 201 lors d’une scintigraphie ;
  • L’injection d’une petite quantité d’iode 123 permet de faire une scintigraphie de la thyroïde (qui a une très grande affinité pour l’iode, stable ou radioactif). 

La curiethérapie est également une application médicale des radionucléides. Cette technique consiste à disposer plus ou moins longtemps une source radioactive à proximité de tumeurs cancéreuses pour les irradier et les détruire, sans trop abîmer les zones saines périphériques. Il peut s’agir d’un implant chirurgical (bille d’iode 125 en porcelaine au contact de la prostate) ou d’un fil (d’iridium 192 par exemple) guidé dans un cathéter dont l’extrémité conduit au site tumoral à traiter. 

Lorsque le traitement d'un cancer n’est pas possible par curiethérapie, les médecins ont recours à la radiothérapie externe. La source de rayonnements irradie la tumeur depuis l’extérieur de l’organisme. Aujourd’hui, les très fortes sources radioactives ne sont plus utilisées dans cette technique qui met plutôt en œuvre des accélérateurs d’électrons. Les médecins peuvent également utiliser la radiothérapie interne vectorisée (ou radiothérapie métabolique) en injectant des radioéléments de fortes activités qui viennent irradier un organe ciblé au plus près. Par exemple, l’injection d’une grande quantité d’iode 131 permet l’irradiation de la thyroïde. 

VidéoLa radiothérapie


Les chercheurs utilisent aussi la médecine nucléaire pour comprendre le fonctionnement des organes. Par exemple, les techniques mises en œuvre pour l’étude du cerveau révèlent directement les zones de celui-ci impliquées dans la vision, la mémorisation, l’apprentissage des langues ou le calcul mental. 


pour l’étude de l’environnement

La mesure de l’absorption du rayonnement émis par une source radioactive indique la densité ou l’épaisseur du milieu traversé entre la source et un détecteur. Grâce à cette jauge, il est possible de suivre en continu la teneur de matières en suspension dans l’eau d’un fleuve comme le Rhône, et ainsi réguler la purge de son barrage de façon à ne pas dépasser le niveau qui mettrait en péril la faune et la flore. Marquer un sédiment ou un polluant avec un radionucléide de période courte permet de le suivre à la trace. L’objectif : optimiser les tracés de routes ou d’autoroutes pour minimiser les risques de pollution, ou contrôler si les sites enfouis de stockage des déchets n’ont pas d’infiltration. 

TP "Utilisation d'un appareil de gammagraphie GAM 80"
TP "Utilisation d'un appareil de gammagraphie GAM 80" à l’Institut national des sciences et techniques nucléaires de Cherbourg-Octeville. © F.Rhodes/CEA


Les chercheurs utilisent aussi le déplacement de radionucléides naturels ou artificiels pour suivre le déplacement de masses d’air, de masses d’eau… et analyser l’érosion des sols. Dans ce cas, ils recherchent des traces de césium 137, répandu dans l’atmosphère lors des essais des bombes thermonucléaires ou de l’accident de Tchernobyl et donc facilement datables, ou de plomb 210, descendant naturel du radon 222, tous deux traceurs du phénomène de sédimentation. Comme le plomb et le césium sont fortement retenus par les fines particules du sol, suivre leurs teneurs grâce aux rayonnements qu’ils émettent revient à suivre les mouvements de ces particules, c’est-à-dire l’érosion et la sédimentation.


Dans l'industrie

L’industrie utilise de nombreux équipements opaques et produit de nombreux objets. Les rayonnements issus de certains radionucléides servent à mesurer en continu leur épaisseur ou leur densité : plus le nombre de rayonnements qui traversent l’équipement ou l’objet est faible, plus celui-ci est épais ou dense. L’étude porte en particulier sur le comportement de produits dans des conteneurs ou des tuyaux. Les industries concernées sont multiples : chimie, pétrole et pétrochimie, fabrication de ciment, d’engrais, de pâte à papier, métallurgie, travaux publics… 

Lorsque les pièces à radiographier sont trop épaisses et denses, les générateurs de rayons X ne sont plus en mesure d’être utilisés. Les rayonnements gamma, qui sont plus énergétiques, émis par de fortes sources radioactives, permettent alors de réaliser des radiographies appelées gammagraphies. 

Ces mêmes rayonnements peuvent stériliser des produits médicaux ou alimentaires ou allonger la durée de conservation de certains produits agroalimentaires. Les micro-organismes sont éliminés par des doses suffisantes pour les tuer, sans dégrader le produit lui-même. Les rayonnements émis par de fortes sources radioactives provoquent des réactions chimiques dans le matériau irradié ; la qualité des produits industriels tels que les isolants des câbles électriques, les gaines thermorétractables, les prothèses, les revêtements en téflon, les parquets en alliages de bois et de plastique, les pneus... sont ainsi améliorés. 

Pour finir, les rayonnements issus de sources radioactives peuvent ioniser profondément les atomes d’une matière à caractériser. Les atomes irradiés retrouvent rapidement leur état d’origine en émettant des rayonnements caractéristiques. En mesurant l’énergie de ces rayonnements secondaires, il est possible de remonter à l’élément qui les a émis. Cette technique d’analyse élémentaire permet de connaître la composition de matériaux et produits de l’industrie. 


au service de l'art

Préparation du contrôle gammagraphique de la Vénus de Milo
Préparation du contrôle gammagraphique de la Vénus de Milo au musée du Louvre. © C.Dupont/CEA


La gammagraphie est utilisée pour mettre en évidence les consolidations des statues et situer les inserts métalliques et cavités. Des mesures indispensables avant tout déplacement de ces œuvres d'art ! 

Les rayonnements sont aussi utiles lors d'opérations de conservation et restauration d'objets en matériaux organiques (bois, cuir, fibres…). Comme dans l'industrie, la radiostérilisation débarrasse les statues en bois de tous les insectes xylophages qui pourraient y avoir fait leur nid. De même, les objets trop fragilisés peuvent être consolidés par imprégnation d'une résine, qui sera ensuite greffée au bois par rayonnement gamma.

Les sources radioactives servent aussi à l’analyse élémentaire des peintures de tableaux afin de remonter à la composition des pigments utilisés par l’artiste, expertiser des œuvres, voire détecter des copies de faussaires. 

Au service de l'espace

Dans les explorations lointaines, la lumière du Soleil est trop faible pour pouvoir alimenter les panneaux solaires d’un vaisseau spatial. 
Il faut alors utiliser un générateur d’électricité embarqué. Une source radioactive, comportant des radionucléides émetteurs alpha de très grande activité, dégage une chaleur constante, convertie en électricité par un thermocouple. Ces générateurs RTG (Radioisotope Thermoelectric Generator) utilisent principalement du plutonium 238. 

Des sources radioactives sont également utiles pour l’analyse élémentaire des sols à bord des engins déposés sur la Lune, les planètes et les comètes. 

La datation

Certains radionucléides naturels constituent de véritables chronomètres pour remonter dans le temps. Des méthodes de datation ont été mises au point, fondées sur la décroissance de la radioactivité contenue dans les objets ou vestiges étudiés. On peut ainsi remonter jusqu’à des dizaines de milliers d’années dans le passé avec le carbone 14, voire bien davantage avec d’autres méthodes telles que la thermoluminescence ou la méthode uraniumthorium. 

Les travaux de recherche sur l’évolution du climat reposent sur le carottage et l’analyse physicochimique de multiples archives naturelles : glaces polaires, sédiments, stalagmites… Les scientifiques utilisent la datation potassium-argon pour les roches et la datation uranium-thorium pour les dépôts calcaires. 

La datation au Carbone 14

Le spectromètre de masse de l'accélérateur Artémis
Le spectromètre de masse de l'accélérateur Artémis permet de dater la mort d’un échantillon organique (bois, os, charbons de bois, foraminifères, bouquets séchés, tissus…) jusqu’à 45 000 ans avant la mesure. En 15 ans, 47 000 échantillons ont ainsi été datés. © L. Godart/CEA

La datation au carbone 14 permet d’aborder l’histoire de l’Homme et de son environnement sur une période de 5 000 à 50 000 ans avant aujourd’hui. Le carbone est très répandu dans notre environnement ; il entre en particulier dans la constitution de la molécule de dioxyde de carbone présente dans l’atmosphère. Ce carbone est constitué principalement de carbone 12. Cependant, du fait de l’interaction permanente des rayonnements cosmiques dans l’atmosphère, une petite proportion assez constante de carbone 14 radioactif se trouve à l’état naturel. 

Le rapport carbone14/carbone12 est équilibré entre l’atmosphère et le monde du vivant (animal, végétal…) durant toute la vie grâce aux échanges nécessaires à celle-ci (respiration, photosynthèse et alimentation). Après la mort d’un organisme, le carbone 14 n’est plus renouvelé par ces échanges. Il se désintègre petit à petit et sa proportion diminue. La mesure du rapport carbone 14/carbone 12 permet donc de dater la mort : moins il reste de carbone 14 dans le carbone du fossile, plus la mort est ancienne. 


Vidéola datation par le carbone 14