Des chercheurs de l’Institut de Biosciences et Biotechnologies d’Aix-Marseille (BIAM) ont montré qu’en introduisant, dans la bactérie modèle Escherichia coli, la combinaison de deux gènes, l’un codant pour une enzyme de plante, l’autre pour une photoenzyme de microalgue , on pouvait obtenir une culture bactérienne qui produit en continu des quantités importantes d’hydrocarbures volatils. L’enzyme de plante permet de raccourcir les acides gras produits naturellement par la bactérie. La photoenzyme de microalgue permet, sous l’effet d’une faible lumière apportée à la culture, une conversion efficace de ces acides gras raccourcis en hydrocarbures encore plus petits, donc plus volatils. Ces hydrocarbures ont tendance à sortir des cellules et peuvent donc être simplement capturés et concentrés à partir de la phase gazeuse des cultures. Ils ont en outre l’avantage d’être sous une forme très pure, ce qui limite la formation de particules fines lors de la combustion. La prochaine étape sera de transférer ce procédé à un microorganisme photosynthétique (microalgue ou cyanobactérie), c’est-à-dire à un microorganisme qui ne nécessitera plus d’ajout de sucre dans le milieu de culture, contrairement à E.Coli, mais utilisera le CO2 atmosphérique comme source de carbone.
L'utilisation de microorganismes pour produire des carburants est une voie prometteuse mais n'est pas encore économiquement viable du fait d’étapes très coûteuses : récolte de la biomasse (cellules), extraction des produits d’intérêt, transformation chimique en carburants et élimination des impuretés (raffinage). Le procédé décrit s’inscrit donc dans une stratégie de réduction des coûts par production de molécules de type hydrocarbures qui sont directement utilisables comme carburants et qui sont plus facilement récupérables que d’autres composés qui ne sont pas volatils et doivent donc être extraits des cellules (par exemple les huiles de réserve). Les études de production d’hydrocarbures par des microorganismes qui avaient été menées jusqu’à présent s’étaient intéressées essentiellement aux hydrocarbures présents à l’intérieur des cellules et peu à ceux relâchés dans la phase gazeuse des cultures. Cette étude représente une avancée significative en apportant donc la démonstration que les hydrocarbures peuvent être récupérés en quantité importante et sous forme très pure dans la phase gazeuse des cultures, tout en faisant appel à une voie enzymatique utilisant l’énergie lumineuse (photoenzyme).
© S. Moulin et B. Legeret/CEA