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Les lois de la naissance des étoiles remises en question


Une équipe internationale menée par des chercheurs du CNRS, de l’Université Grenoble Alpes et du CEA vient bouleverser l’idée que l’on se faisait de la formation des étoiles. La précision des observations offertes par le Grand réseau d'antennes millimétrique/submillimétrique de l'Atacama (ALMA) a permis de mesurer la quantité de cœurs massifs progéniteurs d’étoiles au sein d’une région lointaine très active de notre galaxie, et ainsi de montrer que leur proportion y est plus élevée que celle attendue. Publiés dans Nature Astronomy, ces résultats pourraient remettre en cause l’idée largement partagée selon laquelle la distribution en masse d’une population de cœurs progéniteurs d’étoiles serait identique à celle de sa descendance.

Publié le 30 avril 2018
Dans l’espace, derrière le voile des nébuleuses, des nuages de gaz s’agglomèrent et s’effondrent sur eux-mêmes pour former les structures mères des étoiles : les cœurs progéniteurs. Ils évoluent en groupes, accumulent de la matière et se fragmentent jusqu’à ce que naisse un amas de jeunes étoiles de masses diverses dont la distribution a été décrite par Edwin Salpeter sous la forme d’une loi astrophysique en 1955.

Les astronomes avaient observé que la proportion entre les objets massifs et non massifs était la même dans les groupes de cœurs progéniteurs et ceux d’étoiles nouvellement formées. Cela laissait donc penser que la distribution en masse des étoiles à leur naissance, appelée IMF1, découlait simplement de la distribution en masse des cœurs qui leur donnent naissance, dite CMF2. Mais cette conclusion est le fruit de l’étude des nuages moléculaires les plus proches de notre système solaire, peu denses donc peu représentatifs de la diversité des nuages de notre galaxie. La relation entre CMF et IMF est-elle universelle ? Qu’observe-t-on en s’intéressant à des nuages plus denses, plus lointains ?
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L’amas d’étoiles en formation W43-MM1, tel qu'observé avec le plus grand interféromètre millimétrique au monde ALMA (Motte, Nony, Louvet et al. 2018). Les très nombreux sites de formation d’étoiles, appelés cœurs et identifiés ici par des ellipses, témoignent de la forte activité de formation d’étoiles de cette région. © ESO/ALMA/F. Motte/T. Nony/F. Louvet/Nature Astronomy

Ce sont les questions que se sont posées les chercheurs de l’Institut de planétologie et d’astrophysique de Grenoble (CNRS/Université Grenoble Alpes) et du laboratoire Astrophysique, instrumentation, modélisation (CNRS/CEA/Université Paris Diderot)3 lorsqu’ils se sont penchés sur l’amas de cœurs progéniteurs W43-MM1 dont la structure est beaucoup plus typique des nuages moléculaires de notre galaxie que ceux observés auparavant. Grâce à la sensibilité et à la résolution spatiale uniques du réseau d’antennes ALMA installé au Chili, les chercheurs ont établi une distribution des cœurs statistiquement robuste sur une gamme de masse inégalée, allant des étoiles de type solaire aux étoiles 100 fois plus massives. Surprise : cette distribution ne suit pas la loi de 1955 !

En effet, dans le nuage W43-MM1 les cœurs massifs se sont révélés surabondants et les cœurs peu massifs sous-représentés. Ces résultats remettent en question la relation entre CMF et IMF, voire même l’universalité supposée de l’IMF. Il est possible que la répartition en masse des jeunes étoiles ne soit pas la même en tout point de notre galaxie, contrairement à ce que l’on admet encore. Si tel est le cas, la communauté scientifique devra revoir ses calculs portant sur la formation des étoiles et à terme toutes les estimations dépendant du nombre d’étoiles massives : enrichissement chimique du milieu interstellaire, nombre de trous noirs et de supernovæ…

Les équipes vont poursuivre ces travaux avec ALMA au sein d’un consortium regroupant une quarantaine de chercheurs. Leur objectif : étudier 15 régions similaires à W43-MM1 pour comparer leur CMF et évaluer si les caractéristiques de ce nuage sont généralisables. 

(1) Pour “Initial Mass Function”
(2) Pour “Core Mass Function”
(3) Ont également collaboré des chercheurs de l’Observatoire aquitain des sciences de l’univers (CNRS/Université Bordeaux), du Laboratoire d'études du rayonnement et de la matière en astrophysique et atmosphères (CNRS/Observatoire de Paris/Sorbonne Université) et de l’Institut de radioastronomie millimétrique

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