Les technologies quantiques en plein boom
Depuis sa création, le CEA s’est intéressé à de nombreux domaines de recherche de pointe en recherche fondamentale ou technologique, qui sont ou peuvent se révéler importants pour l’accomplissement de ses missions au bénéfice de la souveraineté
de la France. C’est notamment le cas de la physique quantique : dès les années 1980, plusieurs équipes du CEA – qui travaillaient déjà sur le transport électrique quantique dans les nanostructures et, plus globalement, sur les circuits électriques en régime quantique
– se sont investies sur le champ ouvert par la mise en évidence de l’intrication quantique.
« Elles sont ainsi devenues des pionnières de ce nouveau champ à la fois scientifique et technologique », précise Philippe Chomaz, directeur scientifique et des programmes de la recherche fodamentale au CEA.
Fort d’une culture qui va de la recherche à l’industrie du futur, le CEA peut ainsi développer une vision système de l’ordinateur quantique, des briques élémentaires jusqu’aux applications, en passant par les logiciels, les technologies classiques et quantiques nécessaires à son utilisation, et le couplage de ces systèmes quantiques aux supercalculateurs classiques (ce qu’on appelle le calcul hybride).
Dans ce cadre, la start-up Pasqal a livré au Très Grand Centre de Calcul (TGCC) du CEA une unité pionnière de traitement quantique (QPU) de plus de 100 qubits, acquise par GENCI.
« Cette avancée inédite illustre l'engagement fort de la France et de l'Europe via le projet High-Performance Computer and Quantum Simulator hybrid, cofinancé par EuroHPC JU, l'entreprise commune européenne pour le calcul de haute performance, dans le cadre plus large du programme Hybrid Quantum Initiative, HQI, financé par le plan France 2030 », souligne Philippe Lavocat, PDG de Genci.
Objectif affiché : faire des technologies quantiques un atout stratégique et souverain pour la France et l’Europe.
Les capacités en calcul haute performance (HPC) et Big Data du TGCC en font un lieu idéal pour accueillir cette QPU, l'une des premières conçues pour fonctionner en tandem avec des supercalculateurs.
Si le calcul quantique est au cœur de la stratégie mise en œuvre par le CEA, ses équipes sont également impliquées dans le développement de technologies et de matériaux quantiques pour la communication, la détection et la métrologie.
« Dans ces domaines, notre objectif est de développer des briques de base pour des applications variées, en s’appuyant sur les compétences quantiques pionnières du CEA ainsi que sur ses savoir-faire technologiques, notamment en photonique », précise Salvatore Cinà, coordinateur du programme quantique au CEA.
Une dynamique qui s’illustre aussi dans les partenariats noués tant au niveau national qu’européen :
en France, le CEA collabore avec différents partenaires académiques - le CNRS, l’Inria, ou encore l’Université Paris-Saclay et l’Université Grenoble-Alpes. Il soutient de nombreuses start-up françaises (Quobly, Alice&Bob, Quandela) ;
en Europe, le CEA participe à des actions de coordination & soutien structurantes telles que QUCATS & InCoQFlag.
Le CEA dans l'écosystème français et européen du quantique © CEA/Bear Ideas
Des efforts conjugués et démultipliés qui concourent à la cohérence de la stratégie du CEA et assoient son rôle d’acteur majeur dans le développement des technologies quantiques.
Les travaux du CEA sur le calcul quantique
Les ordinateurs quantiques ne remplaceront pas les ordinateurs que nous utilisons actuellement, mais ils collaboreront avec eux pour résoudre des problèmes qui leur sont inaccessibles. Ces machines hybrides seront, en effet, capables d'accélérer la résolution de problèmes dont la complexité croît de façon exponentielle avec leur taille, ce qui les rend intraitables par un ordinateur classique.
Dans le calcul quantique, les erreurs quantiques résultant de la décohérence des états quantiques altèrent les opérations effectuées, limitant ainsi la taille des circuits et le nombre d'opérations quantiques réalisables, la complexité des algorithmes et des problèmes, implémentables sur un ordinateur quantique.
Le CEA travaille sur la maîtrise de ces erreurs en explorant deux voies principales. La première s'appuie sur les technologies des semi-conducteurs pour passer à l'échelle, à l'aide de codes correcteurs
nécessitant un large nombre de qubits.
La seconde voie explore de nouveaux concepts de qubits supraconducteurs intrinsèquement protégés contre les erreurs, et bénéficiant d'une plus grande robustesse à la décohérence. D’autres thématiques sont également étudiées et explorées autour de la photonique quantique, des matériaux quantiques et des nouvelles architectures pour le calcul quantique.
Le CEA en soutien des start-up nationales sur le quantique
Ces programmes de R&D sont de réels atouts pour soutenir l’industrialisation de ces technologies, notamment à travers les différente sstart-up françaises. Créée en novembre
2022 et issue du CEA et du CNRS, la start-up Quobly (ex-SiQuance) ambitionne de développer et de commercialiser à terme un
ordinateur quantique à base de silicium, en utilisant les mêmes technologies que celles des circuits intégrés standards.
Le CEA apporte également son soutien à l’ensemble des start-up nationales qui explorent diverses technologies matérielles de calcul quantique, en leur fournissant un appui technologique par le biais de partenariats de R&D. Il collabore ainsi avec Quandela sur la conception et la fabrication de puces photoniques, avec C12 sur
des technologies basées sur les nanotubes de carbone, et avec Alice & Bob sur la réalisation de qubits supraconducteurs intrinsèquement protégés contre les erreurs.
À Grenoble, une ligne pilote pour la production et l’assemblage de composants supraconducteurs nécessaires aux systèmes de calcul quantiques devrait être mise en place avec IQM, start-up finlandaise implantée en France.
Enfin, le CEA joue un rôle clé dans le développement de critères de référence pour les calculateurs quantiques, tels que l’utilisation d'algorithmes et la résolution de problèmes
de référence. Ces critères sont particulièrement utiles pour les utilisateurs finaux, notamment industriels.
Dans le cadre de l'Afnor en France, du CEN-CENELEC en Europe, de l’ISO-EIC au niveau mondial et avec différents partenaires industriels et académiques, le CEA s'engage activement dans plusieurs travaux européens et internationaux dans le domaine du quantique, qui visent à établir des normes et des standards pour favoriser l'adoption et l'interopérabilité des technologies quantiques.
HQI, c'est quoi ?
Lancée en 2022 dans le cadre de la Stratégie nationale quantique, l’initiative HQI (pour France Hybrid HPC Quantum Initiative) associe une plateforme de calcul hybride couplant plusieurs technologies quantiques au supercalculateur Joliot-Curie exploité par le CEA dans son Très grand centre de calcul (TGCC) pour le compte de Genci et un programme de recherche académique et industrielle, et de dissémination des usages. Une hybridation quantique/HPC qui bénéficiera de l’expertise reconnue des équipes du CEA dans l’exploitation des infrastructures, la sécurité et le support aux scientifiques.
HQI ambitionne de répondre aux besoins des chercheurs académiques et industriels français et européens voulant évaluer, gratuitement, sur une infrastructure publique, le potentiel du calcul quantique pour leurs applications et de développer des collaborations internationales pour favoriser la recherche ouverte.
Les Maisons du Quantique, c'est quoi ?
Au terme d’un appel à projets lancé le 5 juin 2024, GENCI et le CEA ont sélectionné cinq projets portés par des écosystèmes régionaux localisés en Auvergne-Rhône-Alpes (Grenoble), Grand Est (Strasbourg, Reims et Troyes), Île-de-France (Paris, Saclay et Saint-Germain-en-Laye), Nouvelle Aquitaine (Bordeaux et Limoges) et Occitanie (Montpellier et Toulouse) pour héberger les antennes locales d’un réseau national de Maisons du Quantique. La création de ces Maisons du Quantique, portée par le programme France Hybrid HPC Quantum Initiative (HQI) de la stratégie nationale pour les technologies quantiques de France 2030, s’inscrit dans un objectif de dissémination et de support aux communautés d’utilisateurs du calcul quantique hybride.
Toujours plus de froid pour le quantique
Focus sur Cryonext, un programme France2030 piloté par le CEA et le CNRS, lancé officiellement en octobre à Grenoble en présence des partenaires académiques et industriels des écosystèmes de la cryogénie et du quantique.