Les bactéries magnétotactiques ont la capacité
de synthétiser des nano-cristaux de magnétite (Fe3O4) leur permettant de
s’orienter le long du champ magnétique terrestre afin de trouver la
colonne d’eau la plus favorable à leur survie. L’alignement de ces
nano-aimants agit comme l’aiguille d’une boussole. Or, la synthèse de
ces cristaux de magnétite est encore un processus largement incompris et
complexe. En effet, la magnétite est un savant mélange d’oxygène et de
fer sous deux états d’oxydo-réduction différents [Fe(II)Fe(III)2O4]. Les
chercheurs ont montré dans cette étude comment la bactérie produisait
ces deux espèces de fer, dont l’une, le Fe(III), est quasiment
insoluble.
La détermination de la structure
de la protéine MamP a permis de montrer pour la première fois qu’une
partie de cette protéine possède un repliement original appelé «
magnétochrome », que l’on ne trouve que chez les bactéries
magnétotactiques. Celui-ci se caractérise par une forme de creuset
pouvant accueillir du fer. Des expériences complémentaires ont permis de
démontrer que MamP a la capacité d’oxyder du Fe(II) en Fe(III) et de
stabiliser ce dernier dans son creuset. Des études de mutagenèse dirigée
et de phénotypage des variants de bactéries magnétotactiques ont par la
suite confirmé l’importance physiologique de ce creuset.
Enfin, des expériences in vitro
ont montré que MamP, incubée en présence de Fe(II) seul, permet de
produire un précurseur de la magnétite, prouvant que le Fe (III) est
bien le résultat de l’activité de cette protéine.
Cette
étude fondamentale lève le voile sur une partie du processus de
biominéralisation du fer et de la synthèse de nano-aimants chez une
bactérie magnétotactique. Les applications potentielles de ces
nano-aimants sont très prometteuses. Ils pourraient, par exemple, être
exploités comme agent de contraste en IRM. Autre application possible :
la dépollution. En effet, équipées d’une enzyme qui dégrade des agents
polluants, les bactéries magnétotactiques pourraient servir à traiter
des effluents et être ensuite facilement récupérées par aimantation.
Le creuset de la protéine MamP, structure colorée en gris avec ses
domaines magnétochromes en rouge, permet la transformation de Fe(II) en
Fe(III), deux états redox nécessaires à la fabrication de nano-aimants
de magnétite chez les bactéries magnétotactiques.