La spintronique, qu'est-ce que c'est ?
Les
électrons sont des particules élémentaires chargées négativement. Ils font partie des briques de base des atomes et forment le courant électrique quand ils se déplacent. Ce sont ces charges négatives que les dispositifs de la microélectronique conventionnelle, comme le
transistor, manipulent. Les électrons possèdent également une autre propriété intéressante, appelée
spin.
Le
spin est une grandeur quantique qui n’a pas d’équivalent classique mais qui est assimilable à un
moment magnétique intrinsèque à la particule, comme si l’électron était un minuscule aimant en rotation sur lui-même. De la même façon qu'un aimant possède un pôle nord et un pôle sud, le spin possède une «
orientation », vers le haut (up) ou vers le bas (down).
Tout l’art de la spintronique est donc de tirer parti de ce degré de liberté pour générer des
phénomènes nouveaux et chercher à les utiliser pour améliorer les performances des composants électroniques et du stockage des données. En manipulant le spin des électrons plutôt que leur charge, la spintronique favorise également une électronique très basse consommation.
Explications en vidéo
Premiers pas de la spintronique et premières recherches menées au CEA
La
spintronique, ou électronique de spin, a émergé dans les années 1980. C’est en 1991 qu’elle a vu le jour au CEA, trois ans après la découverte par Albert Fert et Peter Grünberg du phénomène dit de “magnétorésistance géante” qui leur valut le prix Nobel de physique de 2007. Le principe : faire varier la résistance électrique d’un matériau constitué de couches successives magnétiques (fer, cobalt, nickel…) et non magnétiques (chrome, cuivre, argent…) en le soumettant à un champ magnétique externe.
Des recherches expérimentales et théoriques ont alors commencé au CEA pour l’utiliser dans divers dispositifs. Dès 1998, elle fut intégrée dans les têtes de lecture des disques durs d’ordinateurs grâce à des travaux de Bernard Diény, actuellement directeur de recherche au
CEA-Irig à l’origine du laboratoire Spintec (voir
encadré), permettant un doublement chaque année de la capacité de stockage.
spintec
Spintec, laboratoire d’excellence
Créé en 2002 par le CEA et le CNRS à Grenoble, avec douze chercheurs, le laboratoire
Spintec a notamment contribué à l’émergence des mémoires MRAM. En 20 ans, il a déposé plus de 80 brevets, et essaimé quatre start-up dont trois sont toujours en activité : Crocus Technology, Hprobe et Antaios. Spintec compte aujourd’hui une centaine de membres.
L'usage de la spintronique dans les mémoires MRAM
L’usage de la spintronique s’illustre notamment dans les
mémoires magnétiques non volatiles (MRAM), où elle est aujourd’hui utilisée de façon universelle.
La Magnetic Random Access Memory est une mémoire non volatile (conservant les données sans alimentation électrique) qui utilise le spin des électrons. Il existe différentes technologies d’écriture de l’information dans ces mémoires, dont celle « à couple de transfert de spins » étudiée dans le
laboratoire Spintec depuis 2004 et aujourd’hui présente dans nos ordinateurs.
© Les défis du CEA / J. Perrodeau
Télécharger l'infographie sur les mémoires MRAM, extraite des Défis du CEA n°249
Avantages de la spintronique pour les MRAM
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Non-volatilité : les données sont stockées sous la forme d’une orientation magnétique, celle des couches des
jonctions tunnel qui demeure en l’absence d’alimentation électrique ;
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Vitesse d’écriture : jusqu’à 0,3 nanoseconde, soit 1 000 à
100 000 fois plus rapide qu’une mémoire flash ; -
Endurance à l’écriture : les matériaux ferromagnétiques autorisent plus de cycles d’écriture-lecture que les mémoires impliquant des déplacements atomiques (matériaux à changement de phase ou oxydes résistifs) ;
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Faible voltage utilisé : qui permet d’être 400 fois plus économe en énergie qu’une mémoire flash lors de l’écriture.
Les autres applications de la spintronique
D'autres dispositifs numériques utilisent la spintronique : les
capteurs de champ magnétique, très utilisés dans les secteurs de l’automobile, la robotique, les biotechnologies et le biomédical. Les recherches profiteront à terme à d’autres domaines comme le calcul dans la mémoire, la
cybersécurité, les télécommunications, les
data centers et l’intelligence artificielle.
Cette discipline devenue incontournable est inscrite dans les stratégies d’accélération du plan
France relance 2030.