L'accident de la centrale nucléaire de Fukushima en mars 2011 a entraîné un rejet massif de contaminants radioactifs dans l'atmosphère. Pour réduire le débit de dose dans l'air et favoriser le retour des habitants dans les zones évacuées, les autorités japonaises ont mis en œuvre un programme de décontamination des sols de 2013 à 2019 sans précédent à ce jour dans l'histoire.
Lors de précédents travaux, des chercheurs du LSCE et leurs collègues avaient montré que les concentrations de césium 137 (137Cs) dans les sédiments transportés par les systèmes fluviaux drainant le principal panache de pollution radioactive ont diminué d'environ 90 % entre 2011 et 2020. Cependant, ce programme s'est concentré sur les zones cultivées et résidentielles, sans traiter les forêts qui couvrent la plus grande partie des régions contaminées sur des pentes abruptes.
Dans ce contexte, quel est l'impact du programme de décontamination sur la rémanence des contaminants radioactifs dans les paysages de Fukushima ?
Un modèle de transfert de l'eau, des sédiments et du césium 137
Pour répondre à cette question, des chercheurs du BRGM et du LSCE et leurs partenaires japonais du National Institute for Environmental Studies et de l'Institute of Environmental Radioactivity ont dû développer de nouveaux outils. Ils ont utilisé le réseau de surveillance japonais des rivières pour construire et valider un modèle de transfert de l'eau, des sédiments et du 137Cs dans un bassin hydrographique représentatif de la zone la plus touchée du Japon.
Il en résulte que seulement 16 % de la surface du bassin versant étudié ont été décontaminés, d'après les données disponibles. Mais après la décontamination, il reste 67 % du radiocésium relâché dans les forêts et le flux de 137Cs dans les rivières n'a été réduit que de 17 % par rapport à un scénario sans décontamination (simulé avec le modèle validé).
Selon les auteurs, l'étude soulève la question du bilan coût/bénéfice de la décontamination d'un faible pourcentage de la surface du paysage, alors qu'on estime que seuls 30 % des habitants sont rentrés dans la région depuis 2019. Ce nouvel outil de modélisation pourra être utilisé pour comparer divers scénarios de gestion post-accidentelle en cas de futures crises nucléaires ou industrielles.