Comment a débuté l'aventure du recyclage du combustible usé ?
Dès la construction du
parc nucléaire français, le CEA s’est interrogé sur la récupération des matières valorisables du combustible usé. La technique existait déjà, développée outre-Atlantique en 1945 dans le cadre du projet Manhattan (production de la première bombe atomique). Elle repose sur
le procédé Purex faisant intervenir la molécule TBP (Tributylphosphate) pour extraire du combustible l’uranium et le plutonium. Objectif : séparer ces derniers pour les
recycler.
Développement de technologies pour le traitement du combustible usé dans l’installation Atalante. © Lecouster/CEA
Pour le CEA, il s’agissait d’adapter ce procédé également pour les besoins des industriels et des usages civils. Ces recherches, conduites sur le centre de Fontenay-aux-Roses puis transférées à
Marcoule, ont abouti en 1958 au démarrage de l’atelier UP1 de Marcoule, puis en 1965 à celui d’UP2 de la Hague.
A quelle période ces procédés ont-ils été transférés à l'industrie ?
Cette activité a été transférée à la filiale Cogema (actuel Orano) en 1976. Entre-temps, UP2 s’était agrandie pour former, avec la création d’UP3, l’usine de retraitement de la Hague. De nos jours, Orano y traite chaque année plus de 1 000 tonnes de combustibles usés, avec une efficacité telle que plus de 99,9 % du plutonium est aujourd’hui récupéré. Avec l’uranium appauvri également extrait, il entre dans la composition du
combustible MOX grâce auquel 44 réacteurs dans le monde (Belgique, Chine, Etats-Unis, Japon, Pays-Bas, Royaume-Uni) produisent de l’énergie, dont 22 en France.
La France a-t-elle une spécificité dans ce domaine du recyclage ?
Certainement. Dès le départ, le CEA a souhaité mettre en œuvre des moyens pour que
ce cycle de traitement et du recyclage soit organisé de manière durable. Son objectif n’était pas seulement de récupérer dans le combustible usé sa partie valorisable mais également de traiter les déchets. D’où le développement du
procédé de vitrification.
Sur quoi portent les recherches actuelles ?
Les activités se poursuivent, notamment à Marcoule au sein de
l’installation Atalante (1992) qui est sans équivalent dans le monde.
Développement de technologies pour le traitement du combustible usé dans l’installation Atalante. © Lecouster/CEA
Depuis quelques années, dans le cadre de la réflexion sur
les réacteurs à neutrons rapides (RNR) de 4e génération, nous travaillons à optimiser le procédé Purex. Ce dernier est robuste et bien connu, mais il a été conçu pour traiter les combustibles usés de la génération actuelle. Or, ceux de demain seront peut-être multirecyclés et pourraient contenir une plus forte teneur en plutonium. Cela nécessite des évolutions faisant appel à des procédés de traitement innovants et à d’autres molécules extractantes.
Retrouvez cette interview
dans le hors-série des Défis du CEA :