Financée dans le cadre d'un Equipex, la plateforme de microscopie électronique Tempos a été inaugurée le 18 décembre à Orsay, au laboratoire de physique des solides. Unique en son genre, elle est accessible à tous les chercheurs du territoire Paris-Saclay. Ce projet est porté par l’Université Paris-Sud, le CNRS, l’École polytechnique et le CEA. Les industriels Saint-Gobain et Thales sont également impliqués, à travers leurs départements R&D.
La plateforme Tempos a pour objectif de repousser les limites de l’exploration des propriétés des nanomatériaux, depuis l’étude de leurs mécanismes de croissance jusqu’aux mesures aux échelles les plus locales de leurs propriétés physiques. Pour cela, les scientifiques disposent de deux équipements dédiés à l’étude de la croissance et de la physique des nano-objets, Chromatem et Nanomax, complétés par Nanotem, une installation de microscopie électronique, plus généraliste, à la pointe de la technique. Uniques en leur genre, les deux microscopes Chromatem et Nanomax permettent de combiner simultanément des techniques expérimentales qui nécessitaient jusqu’à présent des équipements distincts : spectrométrie photonique et électronique pour Chromatem, élaboration et observation de nanoobjets pour Nanomax.
Lauréat de l’appel à projet Equipex 2010, une dotation de 13,5 M€ a été attribuée pour la création de cette plateforme qui est aujourd’hui opérationnelle.
Un spectromètre unique au Monde
Le microscope Chromatem combine, de manière unique au monde, la spectroscopie électronique ultra-résolue en énergie, les mesures alliant photons et électrons et un environnement à basse température.
Cette association ouvre tout particulièrement deux nouvelles fenêtres d’observation.
- Tout d’abord, l’association électron / photon permet d’accéder aux propriétés optiques des nanoobjets avec la résolution d’un microscope électronique, plus fine que la taille des atomes, soit près de mille fois mieux que la microscopie optique seule, limitée par la longueur d’onde de la lumière, qui peut être cent à mille fois plus grande que les nano-objets étudiés. Les spectroscopies électroniques (EELS et cathodoluminescence) mises œuvre par Chromatem permettent d’accéder aux propriétés d’absorption et d’émission des nano-objets à l’échelle du nanomètre et à la structure spatiale fine des excitations hybrides électron/photon telles que les plasmons ou les excitons.
- En outre Chromatem prend le relai des mesures effectuées avec le rayonnement synchrotron sur tous les phénomènes de transition de phase électroniques, en ajoutant la résolution spatiale à la résolution spectrale en particulier dans des conditions de très basse température. Cet instrument permettra notamment d’étudier si les phénomènes qui impliquent les électrons s’accompagnent ou non de modification de l’arrangement des atomes. Dans le cadre de collaborations avec des experts dans leurs domaines (production d'échantillons, caractérisation physique ou théorie), Chromatem permet de jeter un regard neuf sur de nombreuses questions de pointe : la physique des transitions métal-isolant dans des systèmes à corrélations électroniques fortes, les mécanismes photomagnétiques dans les aimants moléculaires, les propriétés optoélectroniques des nanostructures semi-conductrices, les nanotechnologies quantiques, l’optique et la physique des interfaces dans les dispositifs oxitroniques et ferroélectriques.
Le microscope Chromatem combine, de manière unique au monde, la spectroscopie électronique ultra-résolue en énergie, les mesures alliant photons et électrons et un environnement à basse température. © CNRS
Un microscope pour observer en direct la croissance de nanomatériaux
Nanomax est un microscope électronique en transmission à ultra-haute résolution, dont le but principal est d’observer et de caractériser in situ, à l’échelle atomique, la croissance de nano-objets (nanofils semi-conducteurs, nanotubes de carbone …). La prouesse de Nanomax est de combiner deux processus difficiles à concilier : apporter de la matière au niveau du nano-objet pour le faire croître tout en maintenant partout ailleurs le vide requis par la microscopie électronique à l’échelle atomique.
L’observation en temps réel par cet instrument de la croissance d’un nanofil cristallin a récemment permis de suivre étape par étape la formation de chacun desplans atomiques du fil. Ces résultats démontrent le potentiel exceptionnel de Nanomax et de la configuration de ses sources de matière, unique au monde. Au sein de la colonne du microscope, la matière est amenée sous forme de jets d’atomes, de molécules (épitaxie par jets moléculaires – MBE), de gaz ou de radicaux gazeux (dépôt chimique en phase vapeur – CVD). Cette configuration permet de synthétiser des nanostructures variées avec un excellent contrôle de la cinétique de leur croissance cristalline.
Cet instrument ouvre la voie à la compréhension fine des mécanismes mis en jeu dans l’élaboration de nano-objets, au contrôle de leur morphologie et de leurs interfaces, de leur structure cristalline et de leur composition chimique et, in fine, à la maîtrise de leurs propriétés électroniques et optiques. Il s’agit, à terme, de produire des nano-objets soit à grande échelle, soit pour des applications pointues à haut contenu technologique.
Nanotem est une installation dont la polyvalence permet une large ouverture à l’ensemble de la communauté du site Paris-Saclay. Elle est composée de deux équipements de pointe permettant de réaliser des observations en microscopie électronique sur des problématiques académiques et industrielles, dans le domaine des nanosciences et de la science des matériaux.