Les éruptions solaires sont des évènements qui ont lieu dans l'atmosphère du Soleil. Elles se caractérisent par des émissions de lumière et de particules ainsi que, pour celles à très grande échelle, par l'éjection d'une bulle de plasma. Comprendre l'origine de ces phénomènes est intéressant à plusieurs niveaux. En premier lieu, ces éruptions représentent un exemple proche de nous et bien observé de phénomènes physiques se produisant dans tout l'Univers. Mais c'est surtout en raison de leur impact sur l'environnement terrestre que l'étude et la prévision des éruptions représentent un enjeu important. Elles génèrent en effet des perturbations multiples qui touchent entre autres les générateurs électriques au sol, les satellites ainsi que les systèmes GPS et de communication.
L'atmosphère solaire est structurée en plusieurs couches dont la photosphère, qui équivaut à la surface du Soleil, et la couronne, zone la plus externe où se produisent les éruptions. Il existe un champ magnétique au niveau de ces couches et il joue un rôle prépondérant dans les éruptions solaires. Jusqu'ici les observations n'avaient cependant pas permis de comprendre exactement le mécanisme et les structures impliqués, notamment parce qu'il est difficile de mesurer le champ magnétique en tout point de la couronne très chaude et peu dense.
- Une
corde magnétique est un enchevêtrement de lignes de force magnétiques torsadées comme une corde de chanvre.
- Pour les éruptions solaires à très grandes échelles, on peut observer l'éjection d'une bulle de plasma : on parle d’éjection de
masse coronale.
- D'autres structures apparaissent lors de la formation de la corde magnétique : une émission en rayons X en forme de « S », des émissions en EUV (extrême ultraviolet) et une protubérance de matière froide, toutes observées avant l’éruption.
Une éruption survenue dans la nuit du 12 au 13 décembre 2006 a permis une avancée importante. La région du Soleil concernée était observée par le satellite japonais Hinode au moment de l'éruption et dans les jours la précédant. Des données sur le champ magnétique de la photosphère, plus froide et plus dense que la couronne, ont pu être recueillies par le satellite et ont permis aux chercheurs de calculer l'évolution de l'environnement magnétique dans la couronne durant ce laps de temps.
A partir de calculs réalisés à l'IDRIS (CNRS), les scientifiques ont montré qu'une structure caractéristique, en forme de corde magnétique, apparaît progressivement dans les jours précédant l'éruption. Elle est complètement formée la veille du phénomène. Ce résultat est en très bon accord avec les observations faites au niveau de la photosphère et de la couronne : la formation de la corde magnétique concorde avec l'évolution de taches solaires dans la région de l'éruption et avec l'apparition d'autres structures. Leurs calculs mettent également en lumière que l'énergie de cette corde magnétique augmente au fur et à mesure de son émergence depuis l'intérieur du Soleil.
Grâce à une seconde série de simulations numériques, les chercheurs ont ensuite suivi l'évolution du champ magnétique dans la couronne une fois la corde présente. Leurs résultats montrent que cette structure est bien à l'origine de l'éruption et est même nécessaire pour son apparition : la transition vers l'évènement éruptif n'est pas possible avant sa formation. Cette transition a pu être caractérisée par plusieurs critères : un seuil énergétique et une altitude donnée au-delà de laquelle les arcades magnétiques qui retiennent la corde s'affaiblissent. Si ces points critiques sont dépassés, il y a éruption solaire.
Ces travaux proposent une méthode qui pourra être utile pour la prévision des éruptions. En se basant sur des données magnétiques accumulées en « temps réel » et une chaîne de modèles numériques adaptés, il sera à terme possible, un peu comme en météorologie standard, de prévoir la météorologie dans l'espace et de prévenir les conséquences sur Terre des tempêtes solaires.