Le paludisme est une cause de mortalité importante dans les pays du Sud. Il y a eu, en 2013, environ 200 millions de cas et un demi-million de décès. L’Afrique est particulièrement affectée puisqu’elle subit 90 % des décès. Aujourd’hui, l’un des médicaments les plus efficaces pour combattre le paludisme est l’artémisinine, molécule issue d’une plante trouvée en Chine. Sa découverte, par la professeure Youyou Tu, a été récompensée par le prix Nobel de physiologie-médecine 2015.
Cependant, des foyers de parasites résistants à l’artémisinine apparaissent, ce qui pose la question du mode d’action de cette molécule. De précédentes publications ont proposé que l’artémisinine aurait pour cible l’ATPase-Ca2+ du parasite (une protéine qui transporte l’ion calcium, Ca2+, dans les organites intracellulaires). L’artémisinine conduirait à la mort du parasite en inhibant cette protéine. Ces publications ont entraîné un grand nombre d’études, en particulier des séquençages de génomes du parasite dans les régions confrontées à la présence de foyers de résistance. Or, des scientifiques de l’Institut de biologie intégrative de la cellule (Université Paris-Sud/ CEA/ CNRS), en collaboration avec une équipe danoise (Pumpkin, Université d’Aarhus), ont mis au point un système d’expression dans la levure pour étudier la fonction de la protéine suspectée être la cible de l’artémisinine . Dans ce système, l’artémisinine n’a aucun effet sur l’activité de l’ATPase-Ca2+, suggérant fortement que cette enzyme n’est pas la cible de l’artémisinine. Dans cette nouvelle étude, les chercheurs avaient déjà mis au point ce système d’expression dans les ovocytes de la grenouille Xénope ce qui n’a pas non plus permis de montrer le moindre effet de l’artémisinine sur l’activité de l’ATPase-Ca2+.
Ces données, combinées à des études récemment publiées et qui proposent une autre piste quant à la protéine cible de l’artémisinine, devraient réorienter les recherches sur la résistance à cette molécule et les moyens de lutter contre le paludisme.