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Des constats inattendus sur un patchwork corallien

Retour de l’expédition Tara Pacific


​Après deux ans et demi de navigation dans l’océan Pacifique, où se concentrent plus de 40 % des récifs coralliens de la planète, la goélette Tara retrouve Lorient, son port d’attache breton, le 27 octobre. Clap de fin pour l’expédition Tara Pacific, initiée par la Fondation Tara Expéditions, qui a permis d’explorer, avec une approche nouvelle et sur une échelle géographique sans précédent, l’impact des pressions anthropiques sur les récifs coralliens du Pacifique.

Publié le 6 novembre 2018

​Les premières observations révèlent des situations très contrastées dues à des
facteurs de stress globaux et locaux : si certains sites se sont révélés indemnes comme les îles Chesterfield, le réchauffement a impacté de nombreux récifs telles les îles Samoa ou certaines îles des Tuamotu, en Polynésie Française.
De retour avec plus de 36 000 échantillons, les scientifiques poursuivent désormaisleurs analyses afin de mieux comprendre le corail dans son intimité et de déterminer ses capacités d’adaptation aux changements climatiques et environnementaux. Tara Pacific est soutenue par le CNRS, Paris Sciences et Lettres, le CEA, le Centre Scientifique de Monaco et de nombreux autres partenaires publics et privés commeagnès b., la Fondation Veolia ou la Fondation Albert II de Monaco pour ne citer qu’eux.


Du canal de Panama au Japon (2016-2017), puis de la Nouvelle-Zélande à la Chine (2017-2018), Tara aura effectué plus de 36 000 prélèvements dans pas moins de 32 sites coralliens : c’est la plus vaste campagne scientifique consacrée à cet écosystème. Depuis son départ de Lorient en mai 2016, la goélette aura parcouru 100 000 km et fait escale dans une trentaine
de pays.

Certains récifs très impactés par le réchauffement

Dès novembre 2016, à Ducie Island, à l’ouest de l’île de Pâques, les scientifiques ont observé les premiers récifs impactés par le réchauffement climatique. Un blanchissement qui a atteint 30 à 50 % dans certaines îles des Tuamotu en Polynésie, voire 90 % aux îles Samoa dans le Sud Pacifique en novembre 2016. En Micronésie, aux îles Tuvalu et Kiribati, une partie des
récifs étaient déjà morts avant l’arrivée de la goélette, tandis que les récifs de Wallis et Futuna ou des Îles Chesterfield restaient relativement préservés.

Climat global et pollutions locales : un cocktail délétère

C’est un véritable patchwork corallien résultant de perturbations diverses que les chercheurs ont sillonné. La santé des récifs coralliens observés s’avère très contrastée, ils répondent différemment aux stress globaux et locaux. Tara Pacific offre ainsi l’opportunité unique de dissocier les effets des perturbations locales (pollutions, urbanisation, sédimentation due à
l’érosion des sols, techniques de pêche invasives…) de l’incidence des changements globaux (réchauffement climatique global, acidification de l’océan…) et de mesurer l’état de santé de populations coralliennes soumises à ces deux types de perturbations. Un premier constat qui renforce l’importance du développement local durable pour la santé de ces
écosystèmes, rappelant ainsi que le changement climatique global ne doit pas
empêcher la mise en place de pratiques et politiques publiques durables ambitieuses.

Des données inédites

Grâce à cette expédition, les scientifiques ont récolté des données précieuses qui, après analyses, permettront de comprendre le fonctionnement des coraux et des micro-organismes qui le constituent. L’étude de leur génome devrait notamment livrer des informations sur les mécanismes régissant les capacités d’acclimatation du corail aux variations de l’environnement. Il serait ainsi possible d’identifier les conditions optimales permettant d’assurer la survie des coraux en fonction des paramètres environnementaux et biologiques
des récifs coralliens mais aussi de leur microbiote (virus, bactéries, …).

Dans le sillage de l’expédition Tara Oceans (2009-2013), Tara Pacific offrira, grâce aux mêmes méthodes de séquençage, de stockage de données et d’analyses bioinformatiques, la possibilité de décrire les microorganismes des récifs coralliens et leurs interactions encore inconnues. Elle mettra à disposition de la communauté scientifique internationale une base de
données inédite sur les récifs coralliens, permettant de dévoiler la biodiversité d’un récif, à la fois génomique, génétique, virale et bactérienne. Autre caractère spécifique de cette expédition : son approche multidisciplinaire, associant biologistes coralliens, généticiens, océanographes, spécialistes du plancton et des poissons de récifs, bio-informaticiens et même médecins !

Donner le temps aux récifs de se reconstruire pour affronter les stress successifs

La Fondation Tara appelle à la mise en oeuvre urgente d’actions locales pour atténuer les stress directs subis par les récifs, sans oublier l’urgence de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Prolifération des déchets plastiques, tourisme non durable dans les lagons, effluents de l’agriculture et de l’élevage ou encore grandes infrastructures côtières, tous ces facteurs aggravent la situation. Il apparaît qu’une prise en compte renforcée des impacts environnementaux fournira des résultats à court terme.
Six actions locales, immédiates :

  • Améliorer la gestion des déchets, notamment plastiques,

  • Limiter l’impact de l’agriculture, de l’élevage et de leurs effluents

  • Limiter la déforestation pour stabiliser les sols et éviter ainsi le recouvrement des récifs par les sédiments

  • Interdire ou limiter les méthodes de pêche les plus destructrices

  • Prendre en compte en tout premier lieu le critère environnemental dans le développement de grandes infrastructures côtières, telles que digues, ports industriels, etc.

  • Impliquer et sensibiliser les populations locales pour qu’elles préservent leur propre environnement.

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