En utilisant une approche basée sur le criblage à haut débit de
milliers de combinaisons de réactifs, deux équipes de l’Ibitec-S ont mis
en évidence une nouvelle réaction respectant tous les critères de ce
qui est appelé la chimie « click » :
- efficace quelles que soient les conditions réactionnelles ;
- applicable aux milieux biologiques ;
- sélective (la réaction ne doit pas interférer avec le bon fonctionnement du milieu).
La réaction développée par les chercheurs permet d’assembler de manière
spécifique deux éléments sans perturber ni leurs propriétés, ni leur
milieu. Pour cela, elle consiste à munir chacun des éléments d’intérêt
(deux protéines par exemple) d’un motif chimique particulier : le
premier avec un dipôle appelé sydnone (groupement chimique
hétérocyclique doublement chargé), le second avec un groupement alcyne
(une triple liaison chimique, cf figure1). Ces deux motifs serviront à «
emboîter » les deux éléments lorsque le catalyseur de la réaction-click
(du cuivre) sera injecté au milieu.
Principe de la nouvelle réaction « click » développée par les chercheurs
du CEA-Ibitec-S. Reproductible dans n’importe quel milieu réactionnel
(ici une cellule), elle permet d’assembler - ou « clicker » - deux
éléments (rond bleu et carré rouge) de façon spécifique : les autres
éléments présents n’interagissent pas avec la réaction. Ceci est rendu
possible en fixant sur le premier élément un dipôle appelé sydnone (bout
de chaîne en bleu) et sur l’autre, un groupement alcyne (triple barre
en rouge). © F.Taran/CEA
Applications
Si les chimistes disposent de milliers de
réactions chimiques pour construire des édifices moléculaires de plus en
plus sophistiqués, seules quelques-unes d’entre elles peuvent être
utilisées par les biologistes. En effet, les caractéristiques
(température, eau, pression osmotique…) des milieux biologiques sont
telles qu’il est souvent impossible d’y transposer des réactions
chimiques, même les mieux maîtrisées in vitro. Le cahier des charges
d’une réaction applicable aux milieux biologiques est en effet
particulièrement contraignant : milieux aqueux, température ambiante,
présence de nombreux groupements fonctionnels (thiols, amines…). De ce
fait, très peu de réactions peuvent être utilisées avec du matériel
biologique.
Cette réaction permet de connecter deux entités dans
des milieux biologiques aussi complexes que le sang humain. Le champ
d’application de cette nouvelle réaction-click peut s’étendre de la
chimie médicinale (assemblage de médicaments à des anticorps
thérapeutiques…) aux biotechnologies (traceurs pour l’imagerie
médicale…).