Pourquoi le CEA figure-t-il parmi le Top 100 Global Innovators de Thomson Reuters ?
C’est la seconde année consécutive que nous figurons dans ce classement. Ce résultat traduit la politique volontariste mise en place au CEA depuis plusieurs années pour encourager ses chercheurs à protéger la propriété intellectuelle de leurs résultats et ainsi accroître nos capacités de transfert technologique vers les entreprises innovantes.
En 2011, nous avons ainsi déposé 665 brevets prioritaires, ils venaient renforcer un portefeuille comptant plus de 4200 familles de brevets actives fin 2011. Nos estimations pour 2012 montrent que la dynamique se poursuit dans ce domaine et nous nous attendons à une progression continue du nombre de dépôts.
En conséquence, le CEA devient un acteur de plus en plus visible en termes de dépôts de brevets :
- 1er déposant des organismes de recherche français et 3e au palmarès INPI 2011*
- 41e au classement de l’OEB**
- 36e au classement de l’OMPI selon le PCT***.
Pourquoi le CEA mène-t-il une politique aussi dynamique en matière de dépôt de brevets ?
La maîtrise de la propriété intellectuelle est un élément clé de notre stratégie de transfert de l’innovation vers les entreprises. Elle nous rend visibles, crédibles et attractifs aux yeux de nos partenaires industriels.
Aujourd’hui, la recherche est soumise, comme les entreprises et les universités, à la concurrence internationale induite par la mondialisation : un industriel peut nouer des partenariats avec n’importe quelle structure de recherche, quelle que soit sa localisation géographique. Pour un industriel, les données concernant les brevets sont considérées comme de bons indicateurs de la performance d’un organisme de recherche.
Déposer des brevets de qualité en nombre est donc un moyen d’accroître notre reconnaissance par les entreprises au travers d’indicateurs compréhensibles et reconnus au niveau international.
*Publié par l’INPI, le classement 2011 distingue les principaux déposants de brevets en France, selon le nombre de brevets publiés en 2011, ayant été déposés entre le 1er juillet 2009 et le 30 juin 2010.
**OEB : Office européen des brevets. Chaque année, l’OEB publie un classement (non consolidé) selon les demandes de brevets publiées l’année N. Ses statistiques couvrent à la fois les demandes euro-directes et euro-PCT.
***L’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) établit un classement (non consolidé) selon les demandes internationales (demande PCT) publiées l’année N.
A travers cette politique, nous démontrons aussi que nous sommes en mesure de proposer aux entreprises une recherche innovante et sécurisée. Sans la protection conférée par les brevets, celles-ci ne trouveraient pas d’intérêt à investir dans l’exploitation de nos résultats de recherche qui auraient alors peu de chance d’être valorisés.
Quels moyens le CEA met-il en œuvre pour cette stratégie et quels en sont les résultats ?
Nous considérons le développement de la propriété intellectuelle (PI) comme un investissement. En 2011, nous y avons consacré de l’ordre de 24 M€. Dans un contexte budgétaire contraint, ces sommes font l’objet d’une gestion rigoureuse et s’inscrivent dans le cadre de programmes de recherche prioritaires.
Nous avons fait le choix de professionnaliser cette activité. Une vingtaine d’ingénieurs brevets salariés accompagne les chercheurs / inventeurs lors de toutes les étapes de la création et de la gestion de la PI et s’assurent de la pertinence des dépôts. Plus du quart de ces collaborateurs a réussi l'Examen Européen de Qualification (EEQ) et sont donc Agréés près l'Office Européen des Brevets, ce qui atteste de leur haut niveau de professionnalisme dans ce domaine. Leur travail, au plus près des laboratoires, est un gage de qualité des demandes de dépôts déposées.
Nous exploitons nos portefeuilles de brevets à travers nos actions de transferts technologiques vers le monde industriel. Pour ce faire, nous proposons prioritairement des contrats de collaboration à nos partenaires au sein desquels notre capital de propriété intellectuelle est engagé. Nos brevets peuvent parfois être licenciés en échange de redevances. Ils peuvent aussi jouer un rôle essentiel dans la création d’entreprises innovantes. A ce jour, ce sont près de 160 sociétés innovantes basées sur des technologies ou des savoir-faire du CEA qui ont été créées.
En 2011, l’ensemble des contrats du CEA avec le monde industriel, de l’enseignement et de la recherche, a représenté un portefeuille de plus de 2000 accords qui ont contribué directement ou indirectement à la création de plus de 827 M€ de recettes externes au CEA.
Un grand nombre de brevets est-il synonyme de qualité de la recherche menée ?
Critères de calcul du Top 100 Innovators
Thomson Reuters établit annuellement son classement des entreprises les plus innovantes dans le monde. Ce classement n’établit pas de hiérarchie entre les entreprises, mais une liste alphabétique des 100 entreprises les plus actives en matière de brevets.
Quatre critères sont pris en compte pour établir cette sélection :
- Le taux de réussite du dépôt de brevets auprès des différents organismes d'enregistrement. En effet, pour être brevetable, une "invention" doit répondre à trois critères essentiels : elle doit être nouvelle, sa conception doit être inventive et elle doit être susceptible d'une application industrielle.
- L’importance du territoire couvert par le portefeuille de brevets. Un brevet n’a d’effet que dans le pays dans lequel il est délivré et en vigueur : en dehors de ce territoire, quiconque est libre d’exploiter l’invention. C’est la raison pour laquelle les demandeurs déposent des demandes couvrant la même invention sur d’autres territoires.
- « l’influence des brevets", calculée à partir du nombre de citations relevées dans la littérature professionnelle.
- Le volume de brevets déposés.
Pour être en mesure de déposer un nombre important de brevets, il est indispensable de conduire une recherche de grande qualité au meilleur niveau international et de faire preuve d’une capacité d’innovation indiscutable. Ce dépôt est un investissement pour un organisme de recherche et le CEA se veut un investisseur avisé. Un grand nombre de brevets déposé est donc en ce sens représentatif de la qualité de la recherche conduite.
Toutefois, les brevets sont aussi un marqueur fort de la stratégie de propriété industrielle conduite.
Sa mise en œuvre doit s’inscrire dans la logique de développement d’une entreprise et doit tenir compte de son environnement et de ses réalités notamment en termes de ressources financières actuelles et futures. Aussi, on constate que le nombre de dépôts varie bien souvent selon la taille de l’entreprise, et de son secteur d’activité.
Par exemple, dans le domaine de la micro-électronique (téléphonie, produits multimédia…) nos clients doivent renouveler leurs produits en moyenne tous les six mois et les batailles sur le terrain de la propriété intellectuelle sont féroces. En ce qui concerne les énergies renouvelables, la compétition est lancée avec les pays à bas coût de main-d’œuvre.
Dans ce classement, la France figure en tête des pays européens… Quels sont les autres éléments d’une stratégie d’innovation pour rendre notre économie plus compétitive ?
La recherche française est en effet reconnue pour sa créativité dans de nombreux domaines… Pour autant, son impact économique induit est insuffisant. C’est notamment notre capacité à transposer les idées de la recherche à l’industrie qui fait souvent défaut. Cette phase de la recherche dite « technologique » ou « appliquée » ne représente que 11% de nos efforts d’investissement alors qu’elle représente environ 30% en Allemagne ou aux États-Unis.
Bien entendu la compétitivité des entreprises ne se résume pas à l’innovation technologique : d’autres formes d’innovation (qualité, design, services associés) et des facteurs exogènes comme les conditions d’accès au financement, le niveau de formation des salariés, etc. peuvent avoir un impact majeur sur leur développement. Mais l’innovation, technologique constitue le premier maillon de la chaîne : une condition indispensable pour renforcer la « compétitivité hors coût » des entreprises : elle leur permet de réaliser « une montée en gamme » de leurs produits.
Quel rôle peut jouer le CEA dans le redressement de la compétitivité de nos industries ?
Le CEA joue déjà un rôle clé dans le transfert de technologies en France puisqu’il réunit en son sein des chercheurs et des ingénieurs spécialisés en recherche fondamentale ou en recherche technologique. Tous travaillent dans une même dynamique, orientée prioritairement sur des domaines stratégiques bien identifiés : l’énergie, les technologies pour l’information et la santé, la défense et la sécurité.
De longue date, le CEA coopère avec les entreprises dans ses domaines de spécialisation et met à leur portée ses technologies. Il en résulte que beaucoup de produits, y compris de la vie courante, intègrent des innovations nées dans ses laboratoires. C’est le cas, par exemple, des écrans plats des téléviseurs à cristaux liquides, des capteurs pour les airbags des automobiles, de nombreuses puces électroniques présentes dans les téléphones ou dans les consoles de jeu, etc.
C’est dans cette optique de transfert accéléré des technologies auprès du monde industriel que l’Etat a confié au CEA la mission de développer dès 2013 trois nouvelles plateformes régionales (à Nantes, Toulouse et Bordeaux). L’objectif est de démontrer que l’exemple réussi de l’écosystème grenoblois dans lequel le CEA a joué le rôle de moteur d’innovation peut être reproduit ailleurs.