Cette étude met également en évidence que la
part en composés gazeux aromatiques[4] dans les émissions
d’hydrocarbures est deux à trois fois plus riche dans les panaches de
pollution parisiens que dans ceux de Los Angeles, même si la quantité
totale d'hydrocarbures émis à Los Angeles reste beaucoup plus élevée
qu'à Paris. Ces travaux viennent d'être publiés dans la revue Journal of
Geophysical Research.
Les composés organiques volatils (COV), parmi
lesquels les hydrocarbures (molécules constituées uniquement de carbone
et d’hydrogène), sont des polluants atmosphériques majeurs et des
précurseurs de composés nocifs (comme l’ozone troposphérique ou les
aérosols organiques secondaires). En zone urbaine, les sources
d’émission des COV par les activités humaines sont nombreuses : la
distribution, le stockage et la combustion de combustibles fossiles,
ainsi que les activités faisant appel à l’utilisation des solvants, en
font partie. Mais, si ces sources sont bien connues, il n’existe pas
encore de consensus sur leur importance relative alors qu’elle s’avère
indispensable pour estimer leurs impacts.
Une
équipe internationale impliquant des scientifiques français a réalisé
en 2009 et 2010, dans le cadre des programmes MEGAPOLI[5] et CALNEX,
deux campagnes consacrées aux principaux polluants atmosphériques, dont
les COV, dans les mégapoles de Paris et de Los Angeles. A l’aide de
chromatographes en phase gazeuse déployés au sol et d’un spectromètre de
masse à transfert de protons embarqué à bord de l’avion de recherche
français ATR-42, elle a mesuré les teneurs de ces polluants dans les
panaches de pollution de ces deux villes.
En
comparant les données obtenues à d’autres déjà disponibles pour
plusieurs villes d’Europe et des États-Unis, elle a d’abord confirmé
qu’en zone urbaine les hydrocarbures volatils autres que le méthane[6]
(soit des composés comprenant de 2 à 12 atomes de carbone) proviennent
essentiellement des véhicules automobiles. Une conclusion qui va dans le
sens de précédents résultats[7]. Les chercheurs ont ensuite constaté
que les proportions de ces hydrocarbures sont identiques d’une ville à
l’autre (malgré une plus grande utilisation du diesel en Europe qu’aux
États-Unis), et qu’à Los Angeles, elles ne varient pas durant le
week-end, période où le trafic des poids lourds diesel diminue
significativement. Ils ont ainsi pu conclure que les motorisations à
essence constituent probablement la principale source des hydrocarbures
volatils dans les agglomérations.
Cependant,
les chercheurs ont relevé une particularité en région parisienne pour
les hydrocarbures volatils aromatiques[8] autres que le benzène. En
effet, l’étude montre que les proportions en ces composés sont à Paris,
deux à trois fois plus élevées qu’à Los Angeles ou dans les autres
villes d’Europe étudiées. Leur concentration dans la capitale française
n’est cependant que 1,5 fois plus forte que dans la ville américaine du
fait d’une plus forte pollution globale aux hydrocarbures volatils à Los
Angeles. Pourquoi une telle différence entre ces deux villes ? Les
composés aromatiques volatils autres que le benzène[9] sont des
composants majeurs des essences. Or, leurs teneurs dans les essences
varient d’un pays à l’autre. Elles sont plus faibles en Californie qu’en
France en raison d’une réglementation plus restrictive. Voilà qui
pourrait constituer un début d’explication. Les raisons de cette
concentration élevée en hydrocarbures aromatiques volatils dans les
panaches de pollution parisiens ainsi que son impact sur la formation de
nouvelles particules organiques restent à élucider.
[1] Ces hydrocarbures volatils ne sont qu’une partie de la pollution automobile et ne concernent pas les émissions de particules émises par le parc automobile.
[2] Cooperative institute for research in environmental sciences (University of Colorado), Earth System research laboratory (NOAA) et Department of atmospheric sciences (University of California)
[3] IPSL ou Institut Pierre-Simon Laplace regroupe six laboratoires en sciences de l'environnement dont le LISA et le LSCE
[4] En dehors du benzène
[5] Voir :
http://www2.cnrs.fr/presse/communique/1636.htm?theme1=6[6] Le méthane est le plus simple des hydrocarbures (CH4).
[7] Gros et al., 2011, Gaimoz et al. 2011
[8] Les hydrocarbures aromatiques sont des composés de la famille du benzène.
[9] La concentration du benzène dans les carburants est limitée à 1% en volume.
Los Angeles pendant la campagne CALNEX.
© Daniel Lack, CIRES (NOAA, Université du Colorado à Boulder)