Des chroniques historiques témoignent de l’existence de très
forts séismes passés, notamment en 1255 et 1934, sans qu’aucune trace
géologique en surface n’y soit corrélée. La découverte de ruptures de
surface liées à ces événements va permettre d’étudier la périodicité des
forts tremblements de terre dans la région, pour mieux comprendre
l’activité géologique du secteur et améliorer la prévention des risques
encourus par les populations. Ces résultats sont publiés en janvier dans
la revue Nature Geoscience.
Des millions de
personnes sont exposées à de très forts séismes tout le long de
l’Himalaya (figure 1). L’étude du comportement de la faille qui les
produit, dimensionnant pour partie l’évaluation du risque sismique, est
donc cruciale pour les populations locales. L’étude des séismes dans la
région butait sur une difficulté frustrante : en l’absence de découverte
de ruptures de surfaces, la position des failles qui les ont produites
était inconnue. Il était donc difficile d’estimer leur puissance et leur
fréquence.
En réalisant des tranchées dans la zone où la faille
doit atteindre la surface (figure 2), les chercheurs sont parvenus à
mettre à jour deux ruptures de surface sismique affectant des sédiments
de rivières récents. Ces traces géologiques, témoignages des séismes
historiques suffisamment puissants pour affecter la surface de la Terre,
ont été identifiées par une cartographie géologique détaillée
entreprise dans le sud-est du Népal. Les charbons de bois prélevés dans
les dépôts sédimentaires affectés par la rupture sismique ont été datés
au carbone 14. Ces datations révèlent que ce segment de la faille
frontale himalayenne a été activé par deux fois depuis le 13e siècle :
- la première rupture est attribuée au grand séisme himalayen de 1255
qui dévasta Katmandu et blessa mortellement le roi du Népal Abhaya Malla
;
- la seconde correspond au séisme de magnitude 8.2 du 15 janvier 1934.
Cette découverte laisse supposer que d’autres grands séismes
historiques himalayens ont probablement produit des ruptures de surface
qu’il reste à déchiffrer. C’est un enjeu majeur pour la communauté
scientifique qui trouve dans cette région un laboratoire exceptionnel
d’étude du cycle sismique.
Figure 2 : Tranchée paléosismologique de 43 m de long excavée au travers de l’escarpement sismique (Népal). Les ruptures de 1255 et 1934 ont pu être datées indirectement dans cette tranchée après prélèvements de charbons de bois déposés dans les sédiments affectés par les failles. Crédit : L. Bollinger