"Avoir la peur au ventre" ou "l'estomac noué" sont des expressions courantes qui portent bien leur nom. Depuis quelques années, les scientifiques multiplient les découvertes concernant les relations entre notre cerveau et le microbiote intestinal. Une étude dirigée par l’Institut Pasteur et impliquant le CEA-Joliot s'est penchée sur les liens entre les déséquilibres du microbiote et les troubles psychiques, en particulier la dépression.
Grâce à un modèle de souris (sain ou présentant des troubles de l’humeur induits par un léger stress chronique), les chercheurs ont étudié les relations entre le microbiote, le métabolisme de certains acides gras et la neurogenèse dans l’hippocampe, une région cérébrale fortement impliquée dans le développement des symptômes dépressifs. Ils montrent que les symptômes des souris stressées (diminution de la neurogenèse dans l’hippocampe et troubles de l’humeur) peuvent être transférés à des souris receveuses naïves par une transplantation de microbiote fécal. Leur analyse révèle que les souris receveuses possèdent un métabolisme des acides gras altéré, qui entraîne une diminution de l’activité du système endocannabinoïde[1] dans le cerveau. Les effets indésirables de ce transfert de microbiote peuvent être atténués par l’augmentation du taux de cannabinoïdes endogènes. En outre, les chercheurs montrent que le stress léger chronique induit chez les souris un déséquilibre du microbiote intestinal caractérisé par une diminution de l'abondance de certaines bactéries, les lactobacilles.
Ces observations suggèrent fortement qu'un déséquilibre du microbiote et des troubles de l'humeur sont reliés par le système endocannabinoïde. De plus, des interventions diététiques ou probiotiques pourraient peut-être constituer des leviers efficaces pour lutter contre les syndromes dépressifs associés au stress.
[1] Le système endocannabinoïde est un acteur majeur de l'homéostasie (équilibre) cellulaire