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Résultat scientifique | Environnement

Incendie de Notre-Dame : quelle contribution à la pollution au plomb de l’environnement parisien ?


​En s'appuyant sur les signatures isotopiques du plomb, le groupe Métal du Chantier Notre-Dame, qui compte des chercheurs du LSCE (CEA-CNRS-UVSQ), révèle que l'incendie de Notre-Dame a relâché ce métal dans l'atmosphère, provoquant, le jour même, un pic de pollution ponctuel, atteignant jusqu'à cent fois la valeur habituelle.
Publié le 25 novembre 2020

Le soir de l'incendie de Notre-Dame-de-Paris, le plomb de la couverture a fondu ou s'est dispersé sous forme d'aérosols, selon la température atteinte. Quelle a pu être l'ampleur de cette dispersion ?

Avant même ce jour fatidique, le plomb contenu dans la couverture et la flèche de Notre-Dame estimé à environ 450 tonnes est déjà une source de pollution, via le lessivage par l'eau de pluie, une source parmi beaucoup d'autres (les joints d'étanchéité des toitures et balcons, par exemple). À Paris, ce métal neurotoxique est en effet présent dans les ruissellements sur les chaussées et les façades, dans les particules atmosphériques émises par les incinérateurs de déchets urbains, dans les sols et les eaux usées, car même si de nombreux usages ont été arrêtés ou interdits (tuyaux d'eau potable, caractères d'imprimerie, peintures ou additifs des essences, etc.), le plomb persiste.

Comment déterminer l'impact de l'incendie de Notre-Dame sur l'environnement parisien ? Par la signature isotopique du plomb ! Véritable empreinte géologique qui se conserve de la mine aux objets manufacturés, elle permet également de tracer l'origine du métal, même s'il a été recyclé.

Cette approche nécessite une bonne connaissance des routes d'approvisionnement pour trouver toutes les sources possibles de plomb à une époque donnée. Ainsi, grâce à une démarche interdisciplinaire mise en œuvre depuis plus de dix ans pour l'étude du bassin de la Seine, les chercheurs ont pu identifier la mine de Rio Tinto en Andalousie (Espagne) comme la principale source de plomb pour la construction du Paris haussmannien (1852-1870).

La signature isotopique du plomb émis par l'incendie de Notre-Dame de Paris a été mesurée à partir d'échantillons de poussière issus de l'incendie et exempts de toute autre pollution. Elle est proche de celle du plomb de Rio Tinto – ce qui est cohérent avec les importations à l'époque de la dernière réfection de Notre-Dame, au 19e siècle – mais semble contenir aussi des plombs médiévaux, tels que ceux de la cathédrale de Chartres et de la Sainte-Chapelle. Ce mélange pourrait s'expliquer par le recyclage, au 19e siècle, des couvertures antérieures. Les signatures se conservant quand on mélange du plomb, le plomb émis par l'incendie serait issu de plombs anciens (18 %) et de plomb « neuf » issu de la mine de Rio Tinto (82 %). Cette évaluation est compatible avec les archives du chantier de Viollet-le-Duc.

Pour étudier le panache atmosphérique de plomb, les chercheurs ont analysé des échantillons issus de programmes de suivi de la qualité de l'air (sites IRSN OPERA, complémentaires de ceux d'Air Parif). Ces mesures montrent une augmentation – claire, mais brève, uniquement le jour de l'incendie – des concentrations atmosphériques en plomb, jusqu'à cent fois plus importantes qu'à l'accoutumée. Ce jour-là, la signature isotopique est totalement différente de celle des filtres avant et après l'incendie : elle se superpose exactement à celle des poussières de Notre-Dame.

Si l'incendie a eu un impact réel et très court sur la qualité de l'air sous le panache, à proximité de Paris, rien n'indique à ce stade qu'il ait eu un impact environnemental global et durable. Les travaux se poursuivent, notamment sur les sédiments de la Seine et les poussières intérieures des habitats parisiens.

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