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Fait marquant | Mécanismes cellulaires

Organisation spatiale des récepteurs de facteurs de croissance dans les zones d’ancrage d’une cellule


​​Comment les récepteurs aux facteurs de croissance se localisent-ils à la surface des cellules pour capter les signaux physiques et biochimiques de la matrice extracellulaire ?
En combinant l’imagerie dynamique à haute résolution, l’optogénétique et les biomatériaux, les chercheurs de l’IAB et de l’Irig sont parvenus à repérer les récepteurs de facteur de croissance dans les zones d’ancrage des cellules pour coordonner les processus d'adhésion et de différenciation des cellules.

Publié le 21 décembre 2022

​L'organisation des récepteurs à la surface des cellules est fondamentale pour coordonner les réponses biologiques des cellules en réponse aux signaux physiques et biochimiques de la matrice extracellulaire. En effet, dans la matrice, les protéines transmettent de multiples signaux aux cellules, d'une manière régulée dans le temps et structurée dans l'espace. 

Par exemple, la fibronectine, une des principales protéines de la matrice, dispose de sites d’interaction suffisamment proches pour établir la liaison à des récepteurs adhésifs intégrines, et à des facteurs de croissance. Cette propriété permet une juxtaposition fonctionnelle entre les intégrines et des récepteurs de facteurs de croissance. 
Des travaux précédents montraient que le facteur de croissance Bone Morphogenetic Protein 2 (BMP2), présenté par une matrice molle, induit un étalement cellulaire. Cet étalement est associé à la formation des structures d’adhérence qui dépendent des récepteurs intégrines. Cependant, les mécanismes et les événements temporels permettant des réponses concertées entre récepteurs intégrines et récepteurs de facteurs de croissance restaient peu explorés. 

Les chercheurs de l’Irig et de l’IAB étudient depuis 15 ans comment les récepteurs aux facteur de croissance BMP-2 coopèrent avec les intégrines, sous l'effet de la BMP2, pour entraîner la migration cellulaire. Leurs travaux récents ont mis en évidence la coopération entre les intégrines, des récepteurs relais de la mécanique tissulaire, et les récepteurs aux facteurs de croissance, qui sont de type tyrosine kinase (nommés ALK3 et BMPR2) impliqués dans la différenciation cellulaire. Les récepteurs ALK3/BMPR2 sont décrits pour former des complexes à la surface des cellules quand ils se lient au facteur de croissance BMP2 (voir figure). 

Cette découverte montre que le récepteurALK3 existe sous forme de deux populations réparties à l'intérieur et à l'extérieur des sites d’ancrage à la matrice extracellulaire en réponse au facteur de croissance BMP2. Ainsi, une première population est associée à l’intégrine et une seconde forme un complexe avec le récepteur BMPR2. Au sein des sites d’adhérence, le recrutement spatial et temporel de ALK3 à côté des intégrines, est un aspect clé du contrôle de la signalisation induite par les récepteurs à BMP-2. Cette répartition des deux populations ALK3 de part et d’autre des sites d’adhérence offre un éclairage nouveau sur la diversité des signaux cellulaires obtenus selon l'organisation spatiale des récepteurs. 

Pour cette étude, les biologistes ont modifié les récepteurs aux facteurs de croissance pour contrôler leur localisation par la lumière (optogénétique) et pour suivre à la nano-échelle leur propriété de diffusion et de confinement. 
D’autre part, la combinaison des biomatériaux avec l’approche optogénétique a permis de mettre en évidence que la proximité entre intégrines et récepteurs de facteurs de croissance était suffisante pour déclencher un étalement cellulaire mais devait s’associer à la présentation du BMP2 par le biomatériau pour contrôler la différenciation cellulaire. La présentation du BMP2 par un biomatériau permet le rapprochement spatial entre les intégrines et les récepteurs de facteurs de croissance et favorise ainsi leur coopération. 

Comprendre l’organisation et la ségrégation spatiale des récepteurs de croissance présente un intérêt physiopathologique dans la mesure où ces récepteurs sont décrits à la fois comme promoteur ou suppresseur de cancer.



Figure : © Corinne Albiges-Rizo (CNRS)
Le BMP2 induit une redistribution du récepteur ALK3 à la surface de la cellule sous forme de deux populations: l'une est séquestrée dans les zones d’ancrage (FA) de la cellule à la matrice extracellulaire (ECM) organisées par les intégrines (vβ3) ; l'autre est immobilisée dans la membrane plasmique en dehors des zones d’ancrage, probablement via son association avec le récepteur BMPRII. 
La matrice fibronectine offre un site de liaison pour l’intégrine (domaine 7-10) et un site de liaison au BMP2 (domaine 12-14) favorisant la proximité entre ALK3 et l'intégrine β3 dans les adhérences focales. La signalisation Smad induite par BMP2 nécessite ALK3, BMPRII et les intégrines β3, tandis que les processus d'adhésion cellulaire (étalement et migration) reposent uniquement sur ALK3 et les intégrines β3. Les biomatériaux développés à l’IRIG ont la caractéristique de présenter le BMP2 ce qui favorise la coopération entre intégrines et récepteurs de facteurs de croissance.
Optogénétique : association des techniques d’optique et de génétique. Des cellules sont modifiées génétiquement pour exprimer une protéine photosensible qui s’active à un endroit précis de la cellule lorsqu'on l'éclaire avec une lumière.

Intégrine : récepteur transmembranaire intervenant dans l'adhésion et la mécanique cellulaire. La structure comprend (1) une partie extracellulaire reconnaissant des protéines de la matrice extracellulaire et (2) une partie intracellulaire reliée au cytosquelette de la cellule.

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