Grâce à de multiples développements méthodologiques et instrumentaux, il existe actuellement un faisceau de techniques complémentaires qui permettent de caractériser finement la structure des matériaux. La résonance magnétique nucléaire est une de ces techniques. Elle permet d’acquérir des données spectrales souvent uniques, mais nécessitant parfois de très longs temps d’acquisition et de traitements des données. Une voie d'amélioration de cette technique, appelée Polarisation Dynamique Nucléaire (DNP), consiste à hyperpolariser un échantillon en rotation et à très basse température. Cette approche permet d'augmenter de plusieurs ordres de grandeur la sensibilité de la RMN conventionnelle à l'état solide. Or, avec les instruments commercialisés jusqu'à présent, il n’était pas possible de travailler en dessous de 100 K, tout en contrôlant la fréquence de rotation du porte-échantillon.
Les chercheurs de l’Irig ont consacré plus de dix années de recherche et développement pour lever ces nombreux verrous technologiques, répondant aux exigences des analyses à très basses températures. Le fruit de leurs travaux compte plusieurs preuves de concepts d’architectures mécaniques, thermiques et fluidiques, protégé par un portefeuille de plusieurs brevets internationaux. Le dernier brevet en date concerne l’innovation du système cryogénique, qui parvient à préserver les performances thermiques grâce à la subtilité des mécanismes pour ne pas perturber les analyses.
La dernière étape de R&D a été réalisée en partenariat avec des ingénieurs de la société BRUKER, leader mondial en instrumentation pour la RMN. Cette collaboration a permis de finaliser l’assemblage du détecteur-sonde sur site, à Grenoble. A noter, la prouesse technique pour parvenir à assembler les différents composants, minutieusement imbriqués comme des « poupées russes », au creux de l’aimant de seulement 76 mm de diamètre : PAVLOT est un cryostat ultra-compact qui pourrait tenir dans une boîte à chaussures ! La sonde est combinée avec le dispositif de conditionnement « SACRYPAN », autonome en fluide cryogénique, pour fonctionner en continu à la très basse température de 40 K. De plus, grâce à une fréquence de rotation de 10 000 tours par seconde, les caractéristiques de cet équipement de haut niveau en font une des figures de référence mondiale. L’instrument est en exploitation depuis le second semestre 2021.
Des résultats scientifiques auparavant inaccessibles, même avec les meilleurs prototypes, ont été obtenus. Du point de vue environnemental et économique, le fonctionnement est bien moins énergivore que le premier prototype conçu il y a quelques années par ces mêmes chercheurs. En effet, l’approvisionnement quotidien en hélium liquide qui coûtait quelques milliers d’euros a été avantageusement remplacé par une connexion électrique alimentée pour un coût d’une centaine d’euros. Lorsqu’il est comparé au seul prototype concurrent, cet instrument mis au point par les chercheurs de l’Irig est 5 fois moins consommateur d’énergie. Les développements de l’instrument se poursuivent et ont dès à présent permis d’obtenir des résultats scientifiques inédits. La conception et la mise au point d’une version de type « industrielle » sont très avancées et permettront un transfert technologique vers un industriel.