La très vaste majorité des plantes qui nous nourrissent aujourd’hui ont été domestiquées, c’est-à-dire adaptées au besoin de l’homme via une sélection artificielle qui a eu pour conséquence de modifier leur apparence, leur taille ou leur territoire de culture. Les céréales par exemple, ont une tige plus courte, des grains plus gros et nombreux qui restent accrochés à l’épi. Les tomates ont des fruits beaucoup plus gros et les pastèques ont une chair rouge et sucrée qui est absente chez le fruit sauvage. Les choux quant à eux sont les grands champions des changements de forme ; une même espèce ayant donné les choux verts, le chou Kale, le chou-rave, les choux de Bruxelles, les choux-fleurs et le surprenant chou romanesco.
Le chou romanesco possède l’une des formes végétales les plus singulières et sa formation restait un mystère. Ce dernier vient d’être résolu par une équipe menée par des chercheurs de l'Irig [collaboration]. Grâce à des travaux combinant modélisation mathématique et biologie végétale, les scientifiques ont pu déterminer que le chou romanesco, mais aussi le chou-fleur, sont en réalité formés par des bourgeons destinés à devenir des fleurs mais qui n'atteignent jamais leur but. Au lieu de cela, ils se transforment en tiges qui à leur tour tentent de produire des fleurs et ainsi de suite. Le chou naît de cette réaction en chaîne qui provoque un amoncellement de tiges sur des tiges. L’étude a montré que la brève incursion des bourgeons dans un état de fleur affecte profondément leur fonctionnement et leur permet, à la différence des tiges normales, de croître sans feuille et de se multiplier quasiment à l’infini. La forme atypique du chou romanesco s’explique par le fait que ses tiges produisent des bourgeons de plus en plus rapidement (alors que le rythme de production est constant chez le chou-fleur). Cette accélération confère un aspect pyramidal à chacune des fleurettes et fait ainsi apparaitre clairement l’aspect fractal de la structure.
Cette étude met en lumière comment la sélection de mutations chez les plantes au cours du processus de domestication a modifié parfois de façon drastique leur forme pour donner les fruits et légumes de nos étals.
Photo d’un chou romanesco.
© Nathanael Prunet
Collaboration : Ont participé des scientifiques du laboratoire de physiologie cellulaire et végétale (CNRS/CEA/INRAE/Université Grenoble Alpes) et du laboratoire reproduction et développement des plantes (CNRS/ENS Lyon/INRAE). Plusieurs universités étrangères sont également impliquées dans l’étude : l’Université polytechnique de Valence, Espagne ; l’Université de Milan, Italie ; l’Université de Californie, Etats-Unis ; l’Université de Nottingham, Royaume-Uni et l’Université nationale autonome du Mexique.