Chez les eucaryotes, l’ADN, en s’associant aux histones, s’organise en une structure appelée chromatine. Sur cette chromatine, les marques dites épigénétiques, permettent un contrôle précis et dynamique de l’expression des gènes nécessaires au bon déroulement des programmes développementaux. Parmi ces marques, les modifications post-traductionnelles portées par les histones ont jusqu’à maintenant été étudiées à l’aide de mutants pour les enzymes qui les catalysent. Cette stratégie a permis des avancées significatives dans le domaine de l’épigénétique. Cependant, les fonctions variées et redondantes des enzymes étudiées rendent difficile la révélation du rôle précis des résidus d’histone et des marques qu’ils portent.
Des scientifiques de l’Irig [collaboration] ont cherché à décrypter plus en détail la véritable fonction de la lysine 27 sur l’histone H3 (H3K27), en développant une approche inédite, parue dans
New Phytologist.
Cette approche consiste à faire exprimer à la plante modèle
Arabidopsis thaliana un variant de l’histone H3 portant une alanine au lieu d’une lysine en position 27, induisant une diminution drastique du niveau de méthylation sur H3K27. Une analyse phénotypique détaillée a révélé de forts effets développementaux dans les lignées correspondantes, certains rappelant les observations déjà faites chez des mutants enzymatiques, d’autres singuliers et encore jamais mis en évidence. Outre une floraison précoce, des feuilles recourbées, et la prolifération accélérée de « cals » à partir de cellules indifférenciées, les lignées obtenues présentent des tiges raccourcies dont l’organisation en types cellulaires est altérée.
Des analyses de transcriptomique et de métabolomique indiquent que ce dernier phénotype est le résultat d’une dérégulation des flux métaboliques dans la voie de biosynthèse des phénylpropanoïdes, et de la lignine.
Ainsi, avec cette nouvelle étude, les scientifiques apportent un éclairage inédit sur les différents rôles joués par la lysine 27 de l’histone H3 chez les plantes, incluant la régulation de voies métaboliques impliquées dans la composition en lignine et le contrôle de l'élongation de la tige.
Cette approche, appliquée à d’autres résidus de protéines histones ou chez d’autres espèces végétales, devrait révéler de nouvelles fonctions dans la régulation de l’expression des gènes du développement et de réponse aux signaux environnementaux.
En images (credit CEA), la comparaison des plantes d’Arabidopsis exprimant une forme modifiée de l’histone H3 (K27A substitution de la lysine 27 en alanine) avec les plantes contrôles exprimant une histone H3 non modifiée (WT) permet de distinguer les différences morphologiques suivantes : floraison précoce et tige raccourcie, meilleure prolifération des cals, défauts de types cellulaires sur l’épiderme et dans les couches inférieures de la tige .
Collaboration : Institut de Biologie Moléculaire des Plantes (IBMP) CNRS de Strasbourg, et Robert H. Smith Institute of Plant Sciences & Genetics in Agriculture - Université de Jérusalem.