Les mémoires magnétiques à accès aléatoire (MRAM) sont des dispositifs spintroniques alliant la non-volatilité (conserve ses données en l'absence d'alimentation électrique), la rapidité et la robustesse face aux radiations. Elles sont destinées à devenir une des briques de base des futurs processeurs et/ou architectures néuromorphiques (ou réseau de neurones). Au cœur du composant, il y a une jonction tunnel magnétique constituée de deux couches ferromagnétiques (de référence et de stockage) séparées par une barrière isolante (Figure 1). Les approches les plus prometteuses privilégient la configuration des jonctions tunnels magnétiques dite perpendiculaire pour laquelle les aimantations de deux couches ferromagnétiques sont perpendiculaires à leur plan.
Figure 1 : Schéma d’un nano-pilier JTM En fonction de l’orientation parallèle ou antiparallèle de l’aimantation entre les 2 couches ferromagnétiques (flèches), la résistance électrique de la jonction sera faible ou forte, codant ainsi l’information binaire. L’une de ces couches, dite de référence, a une aimantation fixe lors du fonctionnement du point mémoire (JTM). La seconde, ou couche de stockage, sert à enregistrer l’information via son aimantation qui, lors de l’écriture, change sous l’action d’un échelon (pulse) de tension de quelques nanosecondes. Pour augmenter la densité d’intégration des mémoires, la taille latérale de la jonction magnétique (
Figure 1) est constamment réduite, mais ceci engendre une augmentation forte du courant nécessaire à l’écriture. Tout naturellement, les conséquences de l’effet Joule deviennent importantes et entraînent l’échauffement de la couche de stockage dont les propriétés magnétiques s’en trouvent perturbées. Son comportement dévie alors du comportement standard désiré. Ainsi le retournement de l’aimantation n’est plus piloté et tout le fonctionnement du point mémoire est mis à l’épreuve.
Les chercheurs de notre institut, ont amélioré le modèle « macrospin » utilisé habituellement afin de décrire le retournement d’aimantation en tenant compte de l’effet Joule. Dans ce nouveau modèle, l’aimantation de la couche de stockage est uniforme et son orientation libre d’évoluer avec le champ et/ou le courant appliqué (pulse). Pendant le pulse, la variation de température par effet Joule impacte plusieurs paramètres magnétiques du système qui sont calculés. Une calibration de ce modèle (
Figure 2) a soigneusement été réalisée afin de permettre de décrire fidèlement le comportement des jonctions perpendiculaires quel que soit la tension appliquée, et ainsi déterminer les points de stabilité (champ, tension) de fonctionnement.
Figure 2 : Diagramme champ-tension mesuré expérimentalement La couleur bleue indique l’état parallèle des 2 couches ferromagnétiques (P, basse résistance électrique), le rouge indique l’état anti-parallèle (AP, haute résistance électrique). Le blanc est la zone de bi-stabilité (P/AP). Les lignes vertes sont les lignes de stabilité issues de la modélisation.
L’intérêt de ce nouveau modèle réside dans son applicabilité à toute sorte de nano-piliers (jonction tunnel magnétique de taille nanométrique latérale) et au fait qu’il sera facilement intégrable dans des outils de conception de microélectronique.