Les spins des électrons ou de leurs lacunes (trous) sont des candidats prometteurs pour encoder l'information quantique car ils peuvent être isolés dans des boîtes quantiques de silicium, grâce à une technologie compatible avec les procédés industriels de la micro-électronique.
À la différence des spins électroniques, les spins de trous peuvent être manipulés par un champ électrique. Ils présentent en effet une forte « interaction spin-orbite », ainsi le déplacement d'un trou induit par un champ électrique se couple à l'état du spin via « l'interaction spin-orbite ». Pour la première fois, des chercheurs de l'Irig sont parvenus à utiliser cet effet pour coupler, de manière cohérente, un spin de trou dans le silicium à un photon micro-onde.
Oscillations et résonance de spin de trou sur la même fréquence
Comment ont-ils procédé ? « Dans le canal d'un transistor silicium fabriqué au CEA-Leti, nous avons piégé un trou entre deux grilles à très basse température (T=10 mK), puis nous avons connecté l'extrémité d'un résonateur supraconducteur micro-onde à l'une des deux grilles. Lorsqu'un photon est piégé dans le résonateur, celui-ci va induire des fluctuations de champ électrique directement délivrées sur la grille du transistor ayant pour conséquence de faire osciller le trou dans le canal du transistor. La magie opère lorsque la fréquence de ces oscillations est exactement égale à la fréquence de résonance du spin du trou », explique Cécile Xinquing Yu, étudiante en thèse à l'Irig. En effet dans cette configuration le photon est absorbé pour faire passer le spin de l'état ↓ à l'état ↑ puis re-émis en faisant passer le spin du trou de l'état ↑ à l'état ↓ et ainsi de suite. La vitesse de cette « absorption/émission » étant directement liée à la force du couplage entre le spin et le photon.
En variant l'orientation du champ magnétique, les chercheurs ont suivi cette vitesse d'absorption/émission. Les résultats obtenus, comparés à un modèle théorique, établissent bien que le spin et le photon s'intrique grâce à l'interaction spin-orbite. A noter que le plus fort couplage observé transforme le photon en une excitation de spin en moins de trois nanosecondes ! « Ces résultats indiquent donc que les qubits de spin de trou piégés dans des transistors silicium et les photons micro-onde peuvent se parler très vite, bien plus vite que leur temps de cohérence », affirme Romain Maurand, physicien de l'Irig. Ainsi il devient envisageable d'échanger un photon entre plusieurs spins pour réaliser une intrication spin-spin à longue distance ce qui pourrait être avantageux pour la réalisation de processeurs quantiques à base de qubits de spin silicium.