L’élastographie par IRM conventionnelle (IRMe) permet d’identifier les lésions comme les tumeurs ou la fibrose, celles-ci étant en général plus rigides, moins élastiques, que les tissus sains avoisinant. Équivalent sophistiqué de la « palpation » des médecins, la quantification de cette rigidité permet par exemple de classer la sévérité des fibroses du foie sur une échelle de 1 à 5. Très prometteuse – en particulier pour le diagnostic des fibroses hépatiques (par exemple d’origine virale ou alcoolique, elles peuvent se transformer en cirrhose, voire en tumeurs cancéreuses) –, cette technique pose néanmoins plusieurs problèmes : coût de l’examen, installation à mettre en place pour chaque patient, faible résolution des images obtenues, instabilité de l’algorithme d’estimation de l’élasticité et limitation de la méthode aux seuls organes superficiels.
Remarquant que les propriétés élastiques des tissus devaient être intimement liées à leur structure microscopique (densité cellulaire, présence de fibres), les chercheurs ont testé l’hypothèse que l’élasticité des tissus peut être estimée directement à partir d’images observées par IRM de diffusion, c’est-à-dire basées sur la diffusion des molécules d’eau plutôt qu’en utilisant des vibrations mécaniques. Développée en 1985 par Denis Le Bihan et son équipe, l’IRM de diffusion (IRMd) est aujourd’hui très largement utilisée en imagerie médicale, et très sensible à la structure des tissus à l’échelon microscopique.
Pour utiliser cette technique d’imagerie, un marqueur de diffusion, défini pour prendre en compte différentes propriétés de diffusion dans les tissus, est converti quantitativement en module d’élasticité après calibration. Cette calibration a été obtenue pour le foie sur un petit échantillon de 7 patients et vérifiée ensuite à l’ensemble des patients.
- L’élastographie convention-nelle par IRM (IRMe) repose sur la production de vibrations mécaniques par un vibreur externe et transmises au patient installé dans le dispositif IRM. Ces vibrations induisent des ondes de cisaillement qui se propagent dans l’organe sous-jacent (comme le foie). Des images IRM sont alors acquises, sensibilisées aux déplacements microscopiques des tissus par des impulsions de gradient de champ magnétique. À partir d’images acquises décalées dans le temps il est possible, en utilisant des algorithmes spécifiques, d’estimer l’élasticité des tissus (module d’élasticité, exprimé en kilopascals) à partir de la vitesse de propagation des ondes qui en dépend.
Le degré de fibrose estimé par les mesures d’élasticité par IRMe et par IRM de diffusion coïncident à 100 %. D’autre part, à partir des images d’élasticité obtenues par IRM de diffusion, il est possible de produire un nouveau type de contraste, simulant le passage d’ondes de cisaillement de n’importe quelle fréquence ou amplitude dans les tissus, sans les difficultés techniques de l’IRMe, révélant l’hétérogénéité de la structure des tissus, notamment dans les tumeurs.
Outre l’absence de matériel mécanique nécessaire pour l’IRMe, l’élasticité virtuelle par IRM de diffusion utilise la méthodologie standard déjà implémentée sur les dispositifs IRM. Les images d’élasticité bénéficient de la résolution spatiale des images natives de diffusion. Potentiellement l’élasticité virtuelle par IRM de diffusion pourra être obtenue dans n’importe quel organe, même profond. Des validations sont à l’étude pour les tumeurs du sein et de la prostate, ou encore les fibroses rénales.
Cette invention a fait l’objet d’un dépôt de brevet par le CEA.