Les sociétés de chasseurs-cueilleurs dépendent étroitement des écosystèmes leur fournissant leurs ressources alimentaires. Au cours des deux derniers siècles, quelque 300 communautés contemporaines ont fait l'objet de travaux ethnographiques.
Des méthodes statistiques exploitant ces données ont permis d'établir des corrélations entre les densités de population et des variables environnementales et de construire ainsi des modèles décrivant l'évolution de groupes humains de chasseurs-cueilleurs dans l'espace et le temps. Ces modèles présentent toutefois des limitations. Il est difficile d'identifier les corrélations issues de liens de causalité et plus fondamentalement, les chasseurs-cueilleurs contemporains ne sont pas rigoureusement les « analogues » de leurs lointains prédécesseurs.
Les auteurs de l'étude coordonnée par Dan Zhu, ancien post-doctorant au LSCE et à l'Université autonome de Barcelone et actuellement maître de conférence à l'Université de Pékin, ont souhaité améliorer ces approches empiriques, en introduisant des processus pilotés par des variables décrites par le modèle global de la biosphère terrestre ORCHIDEE. Le modèle simule explicitement les activités de cueillette et de chasse, ainsi que les flux de carbone résultants entre la végétation, les animaux et les hommes, et en déduit les taux de reproduction et de mortalité des humains.
Ces processus permettent de faire émerger de nouvelles relations de cause à effet jusque-là insoupçonnées.
Ainsi par exemple, des saisons de croissance végétatives courtes pénalisent les ressources alimentaires issues de la cueillette et favorisent celles issues de la chasse, avec une part accrue de la viande dans le régime alimentaire. Cette contrainte incite les chasseurs à explorer de nouveaux terrains de chasse. La densité de population peut alors être divisée par cent alors que la production primaire nette annuelle n'a pas varié. Fait remarquable, ce phénomène est bien étayé par les observations ethnographiques des chasseurs-cueilleurs contemporains.
La seule production primaire de biomasse ne suffit donc pas à décrire l'influence du climat sur les communautés de chasseurs-cueilleurs. La durée de la saison de croissance végétative et la composition de leur régime alimentaire jouent également un rôle de premier plan dans l'évolution de ces populations.
Ce modèle « mécaniste » appliqué au passé permettra de mieux comprendre comment des populations humaines anciennes ont pu évoluer dans différentes régions du monde, dans des conditions paléoclimatiques particulières.