Une ligne orageuse s'étendant sur plus de 100 kilomètres, accompagnée de rafales de vent de plus de 90 km/h et qui se déplace rapidement « tout droit » : un tel phénomène météorologique, baptisé derecho (droit en espagnol), peut parcourir plus d'un millier de kilomètres sans s'affaiblir !
Ainsi, dans la nuit du 17 au 18 août 2022, une ligne de grains orageux s'est formée près des îles Baléares. Elle s'est ensuite déplacée rapidement vers le nord-est, frappant la Corse, l'Italie, la Slovénie, l'Autriche, puis la République tchèque en seulement 12 heures. Des rafales de vent atteignant 225 km/h en Corse ont entraîné la mort de 12 personnes et blessé 106 autres, causant également d'importants dégâts matériels.
Les derechos sont beaucoup moins étudiés en Europe qu'aux États-Unis bien qu'ils y représentent une menace tout aussi réelle.
Pour combler ce retard, des chercheurs du LSCE et de l'Iramis ont analysé pour la première fois l'occurrence des derechos en France pendant la saison chaude (de mai à septembre) et recensé 38 événements entre 2000 et 2022, soit une fréquence moyenne de 1,7 événements par an (ou 5 tous les 3 ans).
Dans le nord-est et l'est
Ces orages touchent presque tout le territoire français, mais leur fréquence est plus élevée dans le nord-est et l'est du pays, avec des évènements qui frappent aussi souvent la Suisse, le Benelux et l'Allemagne.
Les chercheurs ont également exploré la relation entre les derechos et le changement climatique. Pour cela, ils ont examiné les conditions météorologiques associées à ces phénomènes, notamment l'instabilité de l’atmosphère et le « cisaillement vertical » des vents qui se manifeste par un changement de la direction ou de l’intensité du vent avec l’altitude. Ils ont ainsi pu évaluer le potentiel de diverses situations météorologiques à produire des derechos.
Ils observent, dans la période récente, une augmentation de l'instabilité atmosphérique. Ce mécanisme, qui induit une intensification potentielle des orages, est relié à :
- l’augmentation de la chaleur et de l'humidité dans les basses couches de l'atmosphère, qui résulte des émissions de gaz à effet de serre d'origine anthropique et peut également être influencée par la variabilité naturelle du climat ;
- un changement dans la configuration des vents, principalement dû à la variabilité naturelle du climat.