En construction au Chili, le télescope européen ELT (Extremely Large Telescope) verra sa première lumière en 2028. Pour l'heure, il détient le record du miroir primaire le plus grand du monde : ses 39 mètres de diamètre lui permettront de détecter directement une exoplanète et d'analyser son atmosphère. En particulier, son instrument METIS (Mid-infrared ELT Imager and Spectrograph) bénéficiera d'une résolution six fois supérieure à celle du télescope spatial Webb.
Collaborant depuis 2018 à Metis pour différents composants, le CEA-Irfu a notamment caractérisé des « masques de phase » pour la coronographie, technique qui atténue la lumière d'une étoile pour en observer l'environnement immédiat, moins lumineux, comme une exoplanète. Ces masques de phase, conçus par l'Université de Liège (Belgique) et fabriqués par l'Université d'Uppsala (Suède), sont des disques en diamant synthétique de 15 mm de diamètre, sur lesquels est gravé un réseau de microsillons annulaires espacés d'environ 2 µm et d'une profondeur comprise entre 10 et 15 µm.
L'adaptation du banc de test
« La fabrication de ces masques à la géométrie souhaitée est très difficile, même s'il est possible de corriger leur forme après avoir mesuré leurs performances. Nous avons donc adapté notre banc de tests dédié à l'imagerie dans l'infrarouge moyen, initialement développé pour caractériser l'instrument MIRIm du télescope Webb », indique Samuel Ronayette du CEA-Irfu. Ce banc comprend un simulateur d'étoile avec une pupille ajustable, une source étendue, un monochromateur et un cryostat contrôlé par un automate dans lequel se trouvent les coronographes. Pour ces tests de performances, il est également équipé de cinq lasers (de longueurs d'onde comprises entre 8 et 12,5 µm).
En novembre 2023, une campagne de mesures a montré que seul un des trois premiers masques de phase livrés était conforme aux spécifications. Pour les deux autres, les taux de réjection étaient insuffisants aux courtes longueurs d'onde. À partir de ces mesures, les concepteurs des masques ont montré par modélisation qu'il fallait réduire la profondeur de gravure des microsillons de 800 nm, ce que l'Université d'Uppsala (Suède) est parvenue à réaliser. Une nouvelle série de mesures a pu être effectuée au printemps 2024 sur les masques modifiés et a conduit à des taux de réjection améliorés d'un facteur 3 à 7 selon la longueur d'onde. Au final, trois masques répondant aux spécifications ont été livrés, et deux d'entre eux sont particulièrement performants.