Article paru dans le n° 241 des Défis du CEA
L’hydrogène est le carburant propre par excellence : sa combustion ne produit que de l’eau et de l’énergie ! Seulement voilà, sa production, essentiellement réalisée à partir de gaz naturel, est largement émettrice de CO2. D’autres méthodes moins polluantes existent, comme la conversion des surplus d’électricités solaire et éolienne en hydrogène par électrolyse de l’eau, résolvant du même coup la question du stockage de ces énergies intermittentes. Mais ces procédés restent pour le moment très coûteux. Une alternative serait de s’inspirer de la nature, en transformant directement de l’eau en hydrogène grâce à l’énergie solaire, à la manière d’une photosynthèse. C’est l’idée développée par des chercheurs du CEA-Irig, en collaboration avec l’Institut Néel et l’EPFL.
De fer et de cuivre
La photocathode qu’ils construisent repose sur une architecture hybride, associant un semi-conducteur composé de fer et de cuivre, et un catalyseur moléculaire inspiré d’une enzyme naturelle, indispensable à la réaction chimique produisant l’hydrogène. Au niveau du semi-conducteur, l’énergie des photons (lumière) absorbés vient déplacer des électrons, pour les pousser directement vers le catalyseur. Là, électrons et protons se combinent, deux par deux, pour former de l’hydrogène. Rappelons en effet qu’il faut deux électrons et deux protons pour élaborer une molécule d’hydrogène. «
Pour que le système fonctionne, il faut encore lui adjoindre une photoanode qui va oxyder l’eau, produisant de l’oxygène (O2) et fournissant les électrons et protons nécessaires à la production d’hydrogène au niveau de la cathode. Le tout formera un assemblage photoélectrochimique complet », précise Cristina Tapia, post-doctorante au CEA-Irig et colauréate 2018 de l’appel à projet Mogpa (voir focus).
Vers une révolution technologique
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Avec ces matériaux hybrides et ce concept de photosynthèse artificielle, nous sommes sur une technologie de rupture, encore au stade de la recherche fondamentale. Si le modèle fonctionne, ses performances sont encore modestes et nous sommes loin du passage à l’échelle industrielle. Les premiers débouchés n’émergeront pas avant 20 à 30 ans », prévient la chimiste. Il n’empêche. Ces prototypes compacts, non polluants et bon marché, élaborés avec des éléments présents en quantité abondante dans la croûte terrestre (cuivre, fer, etc.) laissent espérer une production à bas coût de carburant à partir d’énergie solaire ! Ils permettraient par la même occasion d’accroître notre indépendance énergétique. Une approche tout à fait dans l’air du temps...
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