Le dioxyde de titane (TiO2) est un additif alimentaire autorisé depuis les années 60. Utilisé pour ses propriétés blanchissantes, il est inclus dans la recette de confiseries, pâtisseries et autres préparations industrielles, sous le code E171 dans l’Union Européenne. Son dossier d’autorisation initial stipule qu’il ne présente aucun risque pour la santé et que son absorption intestinale est minime. Sa réévaluation par l’autorité sanitaire européenne (EFSA), publiée en 2016, a conduit les experts à conclure que les données disponibles indiquaient que l'exposition alimentaire à cette substance ne constituait pas un problème de santé pour les consommateurs. Néanmoins, ils ont souligné l’absence de données sur certains organes, en particulier les organes reproducteurs, et recommandé de mener des études pour combler ces lacunes.
En 2017 est parue une étude de l’INRAE, menée sur des rats exposés par gavage gastrique ou via l’eau de boisson à des doses réalistes de E171, mettant en évidence son effet promoteur dans la cancérogenèse colorectale, ainsi que des perturbations du système immunitaire des animaux exposés.
Des chercheurs de notre institut s’intéressent depuis une dizaine d’année aux effets de nanoparticules de TiO2 sur des modèles de
cellules épithéliales intestinales,
in vitro. Ces modèles allient des
entérocytes et des cellules sécrétant du mucus, reconstituant ainsi la couche la plus superficielle de l’épithélium bordant la partie terminale de l’intestin grêle, l’iléon. Alors que les premiers résultats des chercheurs ont démontré un transfert de nanoparticules de TiO2 depuis la lumière intestinale (intérieur) vers le milieu intérieur, leurs données les plus récentes soulignent des effets cellulaires significatifs, bien que de faible ampleur. Ainsi, E171 n’entraîne pas de diminution de la viabilité cellulaire ni de cassures ou dommages chromosomiques dans l’ADN des cellules exposées, mais perturbe l’équilibre (homéostasie) oxydatif de la cellule, notamment en y causant l’accumulation d’espèces réactives de l’oxygène, toxiques pour la cellule, couplée à l’apparition de bases oxydées de l’ADN
[1]. Ces perturbations n’entraînent pas de stress du réticulum endoplasmique, mais sont associées à un profil inflammatoire, une expression accrue des pompes responsables de l’efflux de ce xénobiotique hors des cellules épithéliales intestinales, et une production accrue de mucus par les cellules muci-sécrétantes
[2].
Sur la base de ces résultats, il semblerait donc que le E171 entraîne des perturbations sub-létales dans les cellules épithéliales intestinales, conduisant ces cellules à mettre en place des mécanismes de défense.
E171 vu en microscopie électronique à balayage.
Collaboration : Institut de Recherche en Santé Digestive, Inserm, Toulouse ; Toxalim, Inra, Toulouse ; Laboratoire Chimie et Biologie des Métaux, CNRS-CEA-UGA, Grenoble.
Les
entérocytes sont un des quatre principaux types de cellules de l'épithélium intestinal, au sein de la muqueuse intestinale.
Épithélium : tissu fondamental formant soit un revêtement externe (en surface de la peau) ou interne (en surface d'une muqueuse), soit une glande et composée de
cellules épithéliales.