Dans leur environnement, les cellules sont soumises à divers signaux extracellulaires qui orientent leur comportement par l’activation d’une signalisation intracellulaire adaptée. Ces signaux sont relayés, pour la plupart, par des protéines de la membrane plasmique, dont l’activité et le temps de résidence à la membrane sont finement régulés. Les arrestines font partie de ces régulateurs. Elles constituent une superfamille de protéines adaptatrices présentes depuis les protistes jusqu’aux mammifères, et partagent un rôle commun dans la régulation du trafic intracellulaire de protéines membranaires et de la signalisation qui leur est associée.
L’amibe
Dictyostelium possède six protéines de type arrestine (AdcA à F). Dans son habitat naturel, cet organisme unicellulaire est capable de répondre à différents chimioattractants tels que le folate libéré par les bactéries dont il se nourrit et l’AMPc, secrété par les cellules elles-mêmes lorsqu'elles sont confrontées à une absence de nutriments. La détection de ces signaux conduit soit à la migration des cellules vers les bactéries (folate), soit à l’agrégation des cellules en jeûne et la mise en place d’un programme de développement multicellulaire conduisant à la différenciation de spores résistantes à la carence nutritive (AMPc).
Les chercheurs du laboratoire de Biologie à Grande Échelle et du Groupe Physiopathologie du Cytosquelette ont montré que l’arrestine AdcC, décrite comme régulant le récepteur cAR1 à l'AMPc, est recrutée à la membrane plasmique en réponse à l'AMPc et au folate (Figure 1). Leurs résultats mettent en évidence que cette réponse implique l’entrée du calcium en réponse à la stimulation des récepteurs à ces chimioattractants, à la fixation du calcium sur le
domaine C2 de la protéine AdcC et à l’oligomérisation d’AdcC
via ses
domaines SAMd’interaction protéine-protéine. De façon inattendue, AdcB qui partage avec AdcC la même organisation structurale et plusieurs propriétés biochimiques dont la liaison du calcium
in vitro, est insensible à l’AMPc et au folate, et ne répond pas à une augmentation de calcium cytoplasmique. Ces différences de comportement signent des modes de régulation différents pour ces deux arrestines.
Les données obtenues pourraient ouvrir des pistes de réflexion dans le cadre d’études menées sur l’amibe pathogène
Entamoeba histolytica, responsable de la dysenterie amibienne chez l’homme, et qui possède également une arrestine à domaine C2. Par ailleurs, d’un point de vue évolutif, de telles études fonctionnelles étendues aux autres membres de la famille des arrestines devraient permettre de définir les fonctions ancestrales assurées par cette famille de protéines et les spécificités apportées au cours de l’évolution pour répondre aux contraintes liées au milieu et au mode de vie des différents organismes.
1 - AdcC (en vert) répond rapidement à un signal AMPc par une translocation transitoire du cytosol vers la membrane plasmique (16’’ après stimulation) qui reflète les fluctuations intracellulaires de calcium déclenchées par la liaison du chimioattractant sur son récepteur.
2 - Schéma de la réponse d'AdcC au chimioattractant AMPc.
Les arrestines AdcC et AdcB, spécifiques aux Dictyostélides, présentent un cœur arrestine de structure similaire à celui des β-arrestines de Mammifères, prolongé en N-terminal par un domaine C2 de liaison aux lipides anioniques dépendant du calcium et en C-terminal par un double domaine SAM (sterile alpha domain).