Près de 38 millions d’objets célestes analysés.
Desi est conçu pour mesurer le spectre de 5 000 objets célestes toutes les 20 minutes, soit cinq fois plus d’objets et deux fois plus vite que les meilleurs instruments existants.
En cinq ans, Desi devrait ainsi cartographier la position et la distance de 35 millions de galaxies et de 2,4 millions de quasars sur un tiers du ciel. Avec Desi, les chercheurs disposeront des cartes en trois dimensions les plus détaillées de l'Univers.
Lever enfin le mystère de la fameuse énergie noire ? Desi permettra aux chercheurs d’interroger l’évolution de l’Univers. Les mesures de distance des objets observés seront confrontées aux prédictions du Modèle standard de la cosmologie. Celui-ci suppose l’existence d’une composante inconnue et jamais directement observée que les chercheurs appellent ‘énergie noire’. Cette énergie serait responsable de l’accélération, depuis cinq milliards d’années, de l’expansion de l'Univers.
«
Desi représente un progrès significatif par rapport aux instruments précédents par le nombre d’objets mesurés. En regardant des objets très différents et à différentes époques, nous pourrons cartographier l'histoire de l'Univers et comprendre sa composition », explique Nathalie Palanque-Delabrouille (CEA-Irfu, Paris Saclay), co-porte-parole de la collaboration Desi.
Une puissante machine à remonter le temps. Compte tenu du fait que la lumière de chaque astre met un certain temps à nous parvenir, les cartes fournies par Desi donneront accès à l’évolution passée de l’Univers à différentes époques.
Les galaxies et les quasars les plus lointains visibles avec les instruments actuels permettent de remonter à 11 milliards d’années dans le passé. En multipliant par 15 le nombre d’objets analysés par rapport aux relevés existants, Desi permettra d’établir la carte la plus dense sur la plus grande étendue jamais observée.
Desi est soutenu par l'Office of Science du Département de l'énergie des États-Unis ; la National Science Foundation des États-Unis, Division of Astronomical Sciences sous contrat avec le National Optical Astronomy Observatory ; le Science and Technologies Facilities Council du Royaume-Uni ; la Gordon and Betty Moore Foundation ; la Heising-Simons Foundation ; le CEA, le CNRS et ses partenaires universitaires en France ; le Conseil national des sciences et technologies du Mexique ; le ministère espagnol de l'économie et ses institutions membres. Les scientifiques de Desi sont honorés d'être autorisés à mener des recherches astronomiques sur Iolkam Du'ag (Kitt Peak), une montagne qui revêt une importance particulière pour la nation Tohono O'odham.
Consultez la liste complète des institutions collaboratrices de Desi, et apprenez-en davantage sur Desi ici : Desi.lbl.gov.
Fruit d’une collaboration internationale pour traquer l’énergie noire, le spectrographe Desi est monté sur l’ancien télescope Nicholas U. Mayall de l'Observatoire national de Kitt Peak, près de Tucson en Arizona.
© Marilyn Chung/Lawrence Berkeley National Laboratory
Equipé de 5000 petits robots disposant chacun d’une fibre optique, Desi est en mesure de pointer automatiquement vers une liste précise de galaxies et de quasars préalablement sélectionnés pour en détecter la lumière et ainsi mesurer leur distance à la Terre.
© LBL
La lumière recueillie dans une petite région de la galaxie du Triangle (en bas) par une seule fibre optique est décomposée en un spectre (en bas) qui révèle les empreintes des éléments chimiques présents dans la galaxie et permet de mesurer la distance de la Terre à la galaxie. Le spectre représenté ici a été recueilli par Desi le 22 octobre.
© Desi Collaboration
Pour aller plus loinLes spectrographes, une réalisation française pour Desi La collaboration internationale Desi est pilotée par le Lawrence Berkeley National Laboratory (Berkeley Lab) du Department of Energy américain. Elle rassemble, près de 500 chercheurs de 75 institutions dans 13 pays. La conception des spectrographes est le fruit d’une collaboration entre le Berkeley Lab, le CEA, le CNRS, Aix-Marseille Université ainsi que l’entreprise française Winlight System, spécialisée dans l’optique de précision.
L’étude et la réalisation des dix spectrographes ont été confiées par le projet Desi à la société Winlight System, basée à Pertuis (84). Filiale de Bertin Technologies depuis 2017, Winlight œuvre depuis 2001 sur le marché de l’optique haute performance principalement pour l’astronomie, le spatial, la défense et les synchrotrons.
Inspection d'une lentille avant intégration dans un des spectrographes
© Winlight
Un spectrographe équipé des trois capteurs de lumière (CDD)
© Winlight
«
Cette réussite est le fruit d’une collaboration étroite entre d’une part les équipes scientifiques composant le consortium du projet Desi et d’autre part un industriel impliqué dans de nombreux programmes de recherche. Ceci démontre la capacité à construire un partenariat gagnant-gagnant en fédérant les expertises françaises pour se positionner sur un projet international » explique Philippe Godefroy, directeur de la société Winlight.
Chaque spectrographe est doté de trois capteurs de lumière (appelés CCD ou dispositif à transfert de charge), positionnés à 15 microns près lors du montage. L’Institut de recherche sur les lois fondamentales de l’Univers (CEA-Irfu, Paris-Saclay) est responsable de la conception, du montage et du contrôle du système de refroidissement spécialisé requis pour optimiser les performances des capteurs CCD. Chaque CCD est placé dans un cryostat qui possède sa propre machine thermique, un tube pulsé conçu par l’Institut de recherche interdisciplinaire de Grenoble (CEA-Irig) et commercialisé par l’entreprise Thales.
«
Les capteurs CCD sont le cœur de l’instrument Desi. Nous avons réalisé la conception du système cryo-mécanique qui les intègre et les fait fonctionner de manière optimale. Nos équipes ont assuré le montage des 30 cryostats et le positionnement de chacun des CCD à la précision requise », explique Pierre-Henri Carton (CEA-Irfu), chef de projet pour les cryostats de Desi.
Le montage final des cryostats équipés de leur CCD sur les spectrographes a été réalisé sur le site de Winlight System (Pertuis, Vaucluse) sous la responsabilité des équipes du CEA-Irfu.
Les équipes du CNRS et des universités partenaires
(1) ont réalisé les réglages optiques de ces ensembles. «
Pour chaque spectrographe, nous optimisons la focalisation et nous contrôlons que les performances optiques satisfont les spécifications. Les tests durent 4 semaines pour chaque spectrographe et nous venons de débuter les réglages du dernier des 10 spectrographes ! », explique Pierre-Eric Blanc chercheur du CNRS à l’Institut Pythéas (CNRS/Aix-Marseille Université/IRD/Irstea). «
Pour ces tests, nous avons conçu un système d’éclairement calibré des spectrographes. Nous avons également conçu et fabriqué le système de calibration de l’instrument complet, qui vient d’être installé sur le télescope », complète Laurent Le Guillou, enseignant-chercheur de Sorbonne Université au Laboratoire de physique nucléaire et de hautes énergies (Sorbonne Université/CNRS).
A l’issue de cette étape de qualification, les spectrographes sont expédiés à l’observatoire de Kitt Peak où des équipes techniques du CEA-Irfu assurent l’installation finale et la mise en froid des cryostats. Une équipe du Laboratoire d’astrophysique de Marseille (AMU/CNRS/CNES)
(2) intervient ensuite pour procéder aux réglages finaux des spectrographes. Huit d’entre eux sont d’ores et déjà installés, et les deux derniers arriveront avant la fin de l'année.
La ‘première lumière’ sera suivie d’une période de mise en route de l’instrument jusqu’en janvier 2020. Un programme de validation de la stratégie de sélection des cibles astrophysiques à observer et de planification des observations suivra en février 2020, avant que ne démarre à l’été 2020 le relevé scientifique, pour une période de cinq ans.
«
Avec l’instrument qui est prêt nous allons entrer dans la phase importante de validation des algorithmes de sélection des cibles que Desi observera. C’est une étape cruciale, déterminante pour le succès de notre ambitieux programme de recherche », explique Christophe Yeche (CEA-Irfu), responsable de l’équipe qui définit le processus de sélection des différents types de cibles que Desi prévoit d’observer, galaxies très brillantes, galaxies rouges lumineuses, galaxies à raies d’émission et quasars.
«
La première lumière vient récompenser 10 années d’efforts. Nous allons pouvoir progresser dans notre compréhension de l’énergie noire et je suis impatient de voir les surprises que nous réserve Desi », ajoute Christophe Magneville (CEA-Irfu), responsable scientifique pour les cryostats de Desi.
Un montage astucieux et très innovant sur un ancien télescope Son installation de Desi a commencé en février 2018 au télescope de 4 mètres Nicholas U. Mayall de l'Observatoire national de Kitt Peak, près de Tucson en Arizona. Au cours des 18 derniers mois, les différents composants de Desi ont été expédiés sur le site par des institutions du monde entier et installés sur l’ancien télescope.
Le premier composant arrivé est un ensemble de lentilles d’un mètre de diamètre chacune, qui, une fois monté sur le télescope, permet d’obtenir un grand champ de vision de 8 degrés carrés (soit 32 fois la surface apparente de la pleine lune). Cet ensemble a été testé avec succès en avril.
Le plan focal de Desi, qui compte 5 000 positionneurs robotisés qui pivotent dans une "danse" chorégraphiée pour se concentrer individuellement sur les galaxies et quasars, est placé au sommet du télescope.
Ces petits robots - qui entraînent chacun une fibre optique de la largeur moyenne d'un cheveu humain - servent d'yeux à Desi. Il ne leur faut pas plus de deux minutes pour passer d’une configuration de 5 000 galaxies à une autre.
A chaque pointé, la lumière recueillie par les 5 000 fibres optiques est acheminée vers une série de 10 spectrographes, conçus pour décomposer en longueurs d’ondes la lumière de chaque objet observé et en enregistrer le spectre, afin de permettre des mesures de distances précises.
(1) Au Laboratoire de physique nucléaire et de hautes énergies (CNRS/Sorbonne Université), au Centre de physique des particules de Marseille (CNRS/Aix-Marseille Université) et au Laboratoire d'astrophysique de Marseille (LAM, AMU/CNRS/CNES).
(2) Au sein de l'Institut Pythéas