La photonique sur silicium est considérée comme un outil majeur pour la communication de données optiques, le traitement du signal et les applications de détection. La fabrication de circuits photoniques repose sur des procédés et des protocoles similaires à la technologie CMOS (
complementary metal-oxide-semiconductor) et se limite donc à un ensemble bien défini de matériaux, de préférence de la colonne atomique du groupe IV, comme le silicium. Cependant, l'élément clef, une source laser à commande électrique entièrement intégrée sur Si, fait toujours défaut alors qu'il représente un intérêt à long terme dans le domaine de la Si-photonique. Le germanium, grâce entre autres à sa compatibilité CMOS est un excellent candidat.
Les sources de lumière totalement intégrées en microélectronique sont les briques manquantes de la photonique sur silicium. Le silicium, tout comme le germanium, ne sont pas bien adaptés à l’émission de lumière dans leur forme naturelle, du fait de la nature indirecte de leur
gap. Cependant, le germanium a longtemps été considéré comme un matériau laser prometteur pour l’
optoélectronique à base de silicium du fait de sa compatibilité avec les procédés industriels de type CMOS. Sa structure de
bande peut être rendue favorable c’est-à-dire « directe » (propriété indispensable pour les lasers à semi-conducteur interbande) car elle peut être accordée par déformation de la maille du Si ou en l'alliant avec un autre élément comme le Sn.
Une équipe de chercheurs de l’Irig, en collaboration avec le Département Optique et Photonique et le Département Plate-Forme Technologique du CEA-Leti, avait précédemment obtenu une émission laser en infrarouge moyen (2,7 à 3,2 µm) à 230 K, dans une nanostructure en alliage germanium-étain (GeSn)
[1]. Ce premier résultat ouvrait donc la voie à des sources photoniques intégrables sur puce silicium. Dans une nouvelle étude menée en collaboration avec l’institut Paul Scherrer (PSI) en Suisse
[2], ils ont été en mesure d’obtenir une émission laser en utilisant la seconde approche à partir de germanium pur mais très fortement déformé. Finalement, en combinant ces deux approches, c'est-à-dire en déformant la zone active du microlasers en GeSn, les chercheurs grenoblois ont réussi à obtenir une émission laser sur une très large gamme de fréquence et à une température de fonctionnement atteignant 273 K, à quelques encablures de la température ambiante
[3]. La difficulté majeure de cette ingénierie de bandes, consiste à réaliser un alliage riche en étain tout en préservant sa haute qualité cristalline (pas de défaut cristallins qui annihileraient l'effet laser), ainsi qu’à pouvoir appliquer une forte contrainte sur la zone pour obtenir une émission laser accordable. Grâce au développement d’un nouveau procédé de nanofabrication développé depuis plusieurs années, les chercheurs ont réussi à obtenir un alliage intégrant jusqu’à 16 % d’étain et montrant un caractère gap direct bien marqué.
Avec ce premier résultat à 273 K, l’équipe est déjà bien au-delà des 90 K obtenus en 2015 par les pionniers du laser GeSn. L’objectif maintenant est d'optimiser le système pour tendre vers un fonctionnement à température ambiante pour le rendre utilisable sur des applications photonique.
Image MEB d’un microlaser en GeSn avec contrôle de la déformation uniaxiale dans la zone active. Le dispositif, entièrement suspendu, comporte deux bras tenseurs de germanium tirant sur une zone centrale en GeSn. Sur cette zone, on distingue les aires d’ancrage aux bras localisées de part et d’autre du plot de GeSn. La zone du GeSn est située entièrement dans l’air (on y trouve le résonateur). Cette zone se compose d’un guide d’onde (pont) et de deux miroirs assurant le renvoi de la lumière.
© CEA-IRIG
En physique des semi-conducteurs, la bande interdite (bandgap) est l'intervalle d'énergie où il n'y a pas d'états électroniques autorisés. Elle est délimitée en haut par l'état de conduction d'énergie le plus bas et en bas par l'état de valence d'énergie le plus haut. La relaxation d'un électron excité à travers cette bande interdite entraîne l'émission de photons.
L'optoélectronique est à la fois une branche de l'électronique et de la photonique. Elle concerne l'étude des composants électroniques, appelés aussi composants photoniques, qui émettent ou interagissent avec la lumière.
En physique de l'état solide, la théorie des
bandes prédit les états autorisés des électrons dans les cristaux, avec un potentiel périodique. Contrairement aux atomes individuels avec des niveaux d'énergie discrets autorisés, les états électroniques dans un cristal décrivent un continuum de solutions autorisées dans le plan vecteur d'onde-énergie, connu sous le nom de bandes. L’écartement des bandes d’énergie ainsi que le degré d'occupation électronique de ces bandes sont des facteurs clés qui séparent les cristaux entre isolants, métaux et semi-conducteurs.