Il faut d’abord extraire l’uranium des minerais. Il doit ensuite être dissous puis traité chimiquement pour obtenir une poudre jaune : le
yellow cake. Seule une petite partie (0,7 %) de l’uranium naturel peut produire une réaction de fission, c’est l’isotope 235 ou
uranium 235 (l’isotope le plus fréquent est l’uranium 238). Pour qu'une
réaction de fission en chaîne soit possible, la concentration en uranium 235 doit représenter entre 3 et 5 % du combustible. Le combustible doit donc être
enrichi.
L’uranium enrichi est ensuite transformé en poudre, comprimée en pastilles de 7 grammes, puis empilées dans des tubes métalliques appelés, « crayons de combustible ». D’une hauteur de 4 mètres, ces crayons sont ensuite réunis en faisceaux pour composer des «
assemblages de combustible » qui constituent le cœur des réacteurs nucléaires.
Tous les 4 ans, le combustible dit « usé », est retiré du réacteur pour être en partie recyclé.
Comme pour toutes les sources d’énergie, il faut, pour mesurer son impact environnemental, prendre en compte tout
le cycle de vie d’une centrale, et l’impact carbone de la fabrication de ses composants (béton du génie civil, acier de la cuve, combustible nucléaire…) : c’est pour cela que l’on parle d’énergie bas-carbone et pas d’énergie 100 % décarbonée. . Actuellement, aucune source d’énergie est 100 % décarbonée.
q8
Comment assure-t-on la sécurité et la sûreté des centrales nucléaires en France ?
Les centrales nucléaires sont surveillées, contrôlées et évaluées tout au long de leur durée de vie. Tout est fait pour que sécurité et sûreté soient assurées et que les risques soient maîtrisés dès la conception des centrales.
Concrètement, un ensemble de «
lignes de défense » successives et indépendantes (structure externe en béton armé, enceinte de confinement, gaine des crayons combustibles, mécanismes de contrôle de la réaction de fission, refroidissement d’urgence…) permet de prévenir les dangers potentiels afin de garantir une « défense en profondeur » des installations nucléaires et éviter ainsi tout emballement de la réaction de fission. La résistance des centrales nucléaires aux événements naturels extrêmes (séismes, inondations, neige, tempêtes…) est également prise en considération dès leur conception et est régulièrement réévaluée.
A la conception, mais aussi tout au long de la vie d'une installation, la bonne appréciation de l'efficacité des lignes de défense doit être démontrée dans les rapports de sûreté et leurs réévaluations périodiques.
En France, c’est l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) qui évalue et contrôle les mesures définies par les exploitants, et leur mise en application. La
loi TSN (Transparence et Sécurité Nucléaire) impose un réexamen de sûreté des installations nucléaires tous les dix ans. Par ailleurs, des travaux de R&D sont constamment mis en œuvre pour améliorer la sûreté et l’efficacité des réacteurs.
q9
Quelle est la durée de vie d’une centrale nucléaire ? Jusqu’à quand peut-on prolonger nos centrales ?
En France, les centrales nucléaires sont conçues pour être exploitées pendant
au moins 40 ans. Les 56 réacteurs, actuellement en activité en France, ont été mis en service entre 1977 et 1999.
Pendant leur période d’exploitation, elles sont régulièrement inspectées par l’exploitant EDF et par l’ASN pour s’assurer de leur bon fonctionnement et de leur sûreté. La maintenance est organisée de la façon suivante :
-
Tous les jours, les différents équipements de la centrale sont surveillés pour effectuer des ajustements ou des réparations nécessaires.
-
Tous les 18 mois environ, chaque réacteur est arrêté pendant 5 à 6 semaines pour recharger une partie du cœur en combustible.
-
Tous les 10 ans, une inspection complète et détaillée du réacteur (dit réexamen périodique) est effectuée, en particulier de ses principaux composants comme la cuve, le circuit primaire, les générateurs de vapeur et l’enceinte de confinement. À l'issue de cette inspection, l'ASN donne ou non l'autorisation de poursuivre l'exploitation du réacteur.
Depuis février 2021, l’ASN ouvre la perspective d’une
poursuite de fonctionnement des 32 réacteurs de puissance 900 MWe de dix ans, au-delà de leur quatrième réexamen périodique.
q10
Pourquoi et comment démanteler une centrale nucléaire ?
Quand une centrale ou une installation nucléaire arrive en fin de vie, qu’elle n’est économiquement plus rentable ou par décision politique ou de l’autorité de sûreté, la décision est prise de procéder à son démantèlement.
Le
démantèlement d’une centrale ou d’une installation nucléaire vise plusieurs objectifs :
- Évacuer les substances radioactives et les déchets encore présents dans l'installation à la fin de la phase de fonctionnement ;
- Décontaminer, puis démonter les équipements ;
- Assainir les locaux et les sols puis, si nécessaire, déconstruire les bâtiments de l'installation.
Le démantèlement peut durer
plusieurs décennies. Il doit être anticipé afin d’en maîtriser tous les aspects en matière de sûreté, de radioprotection des travailleurs et de protection de l’environnement. À chaque étape de démantèlement, un
examen de sûreté est réalisé afin d’assurer la maîtrise des risques des opérations.
Une fois ces étapes achevées, l’installation peut alors être « déclassée » et être utilisée pour d’autres usages industriels.
En 2020, 51 installations nucléaires civiles de tout type (réacteurs de production d’électricité ou de recherche, laboratoires, usine de retraitement de combustible, installations de traitement de déchets, etc.) sont actuellement
à l'arrêt (36 du CEA, 9 d'EDF et 6 d'Orano). Le premier réacteur à eau sous pression a été mis à l'arrêt, à Fessenheim, en février 2020.
q11
Qu’est-ce qu’on fait des déchets nucléaires ? Comment sont-ils traités ?
Les déchets radioactifs sont des matières ou éléments (gravats, outils, gants, combustibles usés non valorisables, pièces usagées, parties d’installation nucléaire en démantèlement...) qui contiennent de la radioactivité et pour lesquelles aucune utilisation ultérieure n’est envisagée. En France, les déchets radioactifs sont classés selon deux critères :
leur durée de vie et leur niveau de radioactivité.
La filière nucléaire française trie, retraite, recycle, stocke et surveille ses déchets.
Jusqu’à 96 % du combustible usé issu d’un réacteur nucléaire peut être recyclé. En France, le recyclage du combustible usé permet d’économiser les ressources en uranium naturel et de
diviser le volume des déchets par 5 et leur radioactivité par 10. La France est le pays ayant le plus développé et utilisé cette technologie, déployée dans l’usine Orano de la Hague.
Dès leur production, les déchets radioactifs sont
contrôlés. Ils sont conditionnés pour prévenir tout transfert de radioactivité dans l’environnement et ils sont stockés ou entreposés sous haute surveillance. C’est l’Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs (Andra) qui est en charge du recensement de l’ensemble des déchets présents sur le territoire français. Cet inventaire est disponible sur le site
andra.fr.
q12
Qu’est-ce qu’un EPR ? Quelles différences avec les réacteurs actuels ?
EPR =
Evolutionary Power Reactor (initialement
European Pressurized Reactor)
L’EPR est un réacteur nucléaire de
3e génération, de conception française, reposant sur la technologie des réacteurs à eau sous pression. La principale évolution des EPR par rapport aux réacteurs actuels concerne la
sûreté, encore renforcée. Ils intègrent en particulier, sous le réacteur, un "récupérateur de corium". Cette structure accueillerait le corium, un amas de combustible et de métaux fondus qui se formerait si un accident grave arrivait. Les EPR sont également
plus puissants que les réacteurs actuels, avec une capacité de production électrique de
1 650 MWe. Enfin, ils ont un
meilleur rendement et l'uranium y est mieux "brûlé": ils devraient donc être
plus économiques à l'usage et générer
moins de déchets nucléaires pour produire la même quantité d'électricité.
Des réacteurs EPR sont déjà opérationnels en Chine (2) et en Finlande (1) et en construction en France (1), et au Royaume-Uni (2). 14 sont en projet en Inde, au Royaume-Uni et en France.
q13
Quel futur pour l’énergie nucléaire en France ?
Pour optimiser l’efficience de l’énergie nucléaire, pour décarboner plus encore le secteur énergétique, et pour assurer une indépendance énergétique française sur le long terme, de nouveaux réacteurs sont à l’étude, notamment les SMR. À plus long terme, la piste de la fusion thermonucléaire est envisagée.
Qu’est-ce qu’un SMR ?
Les SMR (Small Modular Reactor) sont des
réacteurs plus petits, de faible puissance (entre 50 et 500 MWe) qui ont la particularité d’être
modulaires : les différentes parties sont conçues pour être fabriquées en série en usine avant d’être assemblées sur site.
Par leur faible puissance, les SMR peuvent s’insérer dans des réseaux électriques à l'échelle locale et sont particulièrement adaptés aux
sites isolés.
Ces petits réacteurs permettraient de
décarboner rapidement une part significative de la production électrique. Ils pourraient aussi à plus long terme produire de la chaleur, et/ou de l’hydrogène en les couplant avec des électrolyseurs haute température ou encore de l’eau douce par dessalement de l’eau de mer. Les projets de SMR conçus et développés en France reposent sur la technologie des réacteurs à eau sous pression.
Les réacteurs nucléaires de 4e génération
La 4e génération correspond aux réacteurs, actuellement en conception, qui pourraient voir un déploiement industriel dans la seconde moitié du XXIe siècle. Ils reposent sur des concepts de
neutrons dits « rapides » et fonctionnent
à plus haute température, des conditions qui leur permettraient une optimisation de l’utilisation du combustible nucléaire. Les recherches sur ces systèmes du futur sont menées dans le cadre du Forum international Génération IV qui a établi les quatre critères auxquels ils devront répondre : la durabilité, la sûreté, la compétitivité économique et la résistance à la prolifération nucléaire. Le CEA, mandaté par l’Etat, mène une veille active sur l’ensemble des concepts de 4e génération.
La fusion nucléaire et ITER
Outre la R&D menée sur les réacteurs nucléaires de fission, la France et en particulier le CEA mènent des programmes de recherche sur la fusion nucléaire en vue de produire de l’électricité. Ces travaux accompagnent le projet international
Iter qui vise à construire
le plus grand tokamak jamais conçu, dans le département des Bouches-du-Rhône. Il s’agit de démontrer que la
fusion thermonucléaire — l'énergie du Soleil et des étoiles — peut être utilisée comme source d'énergie à grande échelle, non émettrice de CO2, pour produire de l'électricité. Les premiers tests sont prévus pour 2025.
q14
Pourquoi la France a-t-elle autant investi dans le nucléaire ?
La France a lancé un programme de développement de l’énergie nucléaire dès 1945, avec la création du Commissariat à l’Energie Atomique par le Général de Gaulle. Son objectif était de pouvoir répondre à la demande croissante d’électricité, en toute
indépendance et à
faible coût. Les centrales nucléaires de première génération ont été mises en service dès 1956.
Après le choc pétrolier de 1973, le gouvernement lance la construction d’une 2e génération de réacteurs à eau sous pression (REP). Au cours de ces années, les progrès technologiques ont permis des améliorations comme une production électrique plus importante et une sûreté accrue, tout en
baissant le coût de l’électricité produite.
Depuis sa création, le CEA mène des recherches pour répondre aux
enjeux de la filière nucléaire française. Il contribue ainsi à améliorer la compétitivité, la sûreté et la durée d’exploitation du parc nucléaire français, en soutien à EDF et Framatome. Il participe également à l’optimisation des installations du cycle du combustible en collaboration avec Orano et l’Andra.